S’exprimant par des douleurs du périnée de connotation neuropathique, la névralgie pudendale est un syndrome canalaire en rapport avec une perte de mobilité du nerf pudendal. On la retrouve préférentiellement entre 50 et 70 ans, dans 60 % des cas chez la femme.
La perte de mobilité du nerf pudentale est liée à des conflits entre le nerf et ses éléments de voisinage dans son trajet pelvien – pince ligamentaire entre le ligament sacro-épineux et sacro-tubéral, dans l’aponévrose du muscle obturateur interne, appelée syndrome du canal d’Alcock – ou fessier (au niveau du canal sous-piriforme). Nombreux sont les éléments déclenchants (vélo, chirurgie pelvienne, chute…) mais il ne faut en général les considérer que comme des révélateurs d’une compression préalable asymptomatique, puisque les études anatomiques sont en faveur de facteurs de compression dans 30 % de la population générale.
Neuropathique, viscérale, sympathique
La douleur a des connotations neuropathiques somatiques habituelles : brûlures avant tout, mais également paresthésies, coups de couteau, engourdissement, sensation de serrement, d’écrasement, de pesanteur… Sont aussi fréquemment retrouvées des douleurs viscérales, sympathiques – sensation de corps étranger intrarectal ou intravaginal. Elle peuvent être unilatérales ou médianes.
Des critères diagnostiques (critères de Nantes) ont été définis et permettent de ne pas trop s’égarer dans le contexte des douleurs pelviennes et de ne pas considérer trop hâtivement que l’absence d’anomalie visible est le témoin d’une pathologie psychogène. Il s’agit de douleurs concernant majoritairement le territoire pudendal (périnéal entre l’anus et la verge ou le clitoris), elles se majorent en position assise (diminuent en position couchée et surtout sur un siège de toilettes) et ne réveillent habituellement pas le patient. Les douleurs sont non-déficitaires à l’examen clinique (absence d’hypoesthésie objective) et disparaissent sous anesthésie tronculaire (uni- ou bilatérale selon les cas) du nerf pudendal à la hauteur de l’épine sciatique, idéalement sous scanner.
Dysfonctions pelviennes
Cette pathologie s’exprime avant tout par la douleur mais s’accompagne dans les trois quarts des cas de troubles pelviens dysfonctionnels, non lésionnels. Ils sont le témoin de réactions réflexes musculaires (qui s’accompagnent de douleurs myofasciales, définies par l’existence de points gâchettes au niveau des muscles piriformes lors de la palpation fessière, ou des muscles élévateurs de l’anus ou obturateurs internes lors des touchers pelviens). Cette composante peut retentir sur les nerfs de voisinage, avec des irradiations dans les territoires sciatiques (en général sciatique tronquée débutant au niveau de la fesse) ou obturateurs (face interne de cuisse).
Ces troubles peuvent se manifester par une hypertonie périnéale avec une dysurie, une constipation terminale, un vaginisme. On peut aussi retrouver des signes en rapport avec une hypersensiblité viscérale secondaire, expliquant une pollakiurie sans anomalie urologique, un syndrome de l’intestin irritable ou des douleurs sexuelles (pendant et souvent après les rapports, aussi bien chez l’homme que chez la femme).
Une imagerie non spécifique
Le diagnostic est clinique et les examens d’imagerie pelvienne ou rachidiennene sont là que pour éliminer une autre pathologie lésionnelle pelvienne, urologique, proctologique, gynécologique ou dermatologique.
Aucun examen n’est suffisamment sensible et spécifique pour affirmer une névralgie pudendale par syndrome canalaire. L’électroneuromyogramme (EMG) peut être normal, car il ne teste pas tous les types de fibres et peut être altéré par d’autres pathologies, notamment les neuropathies périnéales d’étirement, fréquentes après accouchement. Les anomalies découvertes lors d’un EMG, d’un écho-doppler ou d’une neurographie par IRM manquent donc cruellement de spécificité, et les anomalies asymptomatiques fréquentes.
L’évaluation avec quantification de la douleur en station assise juste avant et juste après une infiltration anesthésique du nerf pudendal est en revanche un critère indispensable au diagnostic de syndrome canalaire.
Une évolution imprévisible mais plusieurs traitements
Il existe des formes tout à fait bénignes et transitoires de névralgie pudentale qui ne passeront pas à la chronicité. Mais d’autres seront chroniques (plus de six mois), d’intensité variable, avec parfois des douleurs excessivement intenses et rebelles, accompagnées de toutes les conséquences psycho-affectives et sociales des douleurs chroniques invalidantes.
Le traitement doit être adapté à l’ancienneté et à l’importance de la gêne. Il associe les petits moyens (utilisation de coussins bouées, limitation des stations assises prolongées, arrêt du cyclisme, limitation des déplacements en voiture…), des traitements purement symptomatiques de la douleur neuropathique chronique : neurostimulation transcutanée (que l’on peut appliquer au niveau de la face interne de la cheville du fait des phénomènes de convergence entre pied et périnée), médicaments (progabaline, gabapentine, amitriptyline, duloxétine…), des traitements des symptômes associés (kinésithérapie ou ostéopathie) et une aide sophrologique (relaxation, thérapies brèves type hypnothérapie…).
Chirurgie étiologique
Les infiltrations de corticoïdes locaux n’ont pas montré d’efficacité supérieure aux anesthésiques locaux. Dans les deux cas, 26 % de patients sont soulagés d’au moins 30 % de la douleur initiale, trois mois après une infiltration. La chirurgie, comme dans tout syndrome canalaire, consiste à libérer le nerf pudendal de toutes les zones de conflits lors de son trajet fessier ou pelvien, sous contrôle de la vue. Un abord transfessier permet une telle approche. Lors d’une étude randomisée, une amélioration de plus de 30 % de la douleur à un an chez 72 % des patients opérés a été constatée, contre 12 % des patients traités par les autres méthodes sauf la chirurgie. Les résultats sont donc relatifs, et la chirurgie ne s’adresse qu’à des patients ayant des douleurs rebelles de plus d’un an d’ancienneté. En cas d’échec cette procédure, on peut proposer des techniques de neurostimulation implantée au niveau du cône terminal : dans ce contexte, 70 % de patients améliorés d’au moins 50 % de leur douleur.
* hôpital
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