Les chauves-souris ont une résistance élevée aux infections microbiennes et sont des porteurs sains de nombreux virus pathogènes pour l’Homme comme les virus Ebola ou les coronavirus responsables de syndrome de détresse respiratoire aiguë (SARS-CoV). Des recherches antérieures ont aussi montré que les chauves-souris ont une altération fonctionnelle de l’inflammasome responsable d’une réponse inflammatoire diminuée qui pourrait expliquer en partie leur longévité élevée. Leur espérance de vie est de plus de 40 ans alors que celle des animaux de taille identique est moitié moins.
L’inflammasome est un complexe de protéines composé de trois molécules : une molécule de l’inflammasome comme NLRP3 (ou AIM2 ou NLRP1), la molécule adaptatrice (ASC) et la molécule effectrice (pro-caspase-1). L’inflammasome recrute la protéine ASC via une interaction entre leur domaine PYR (pyrine) alors que la protéine ASC recrute la pro-caspase-1 via une interaction avec leur domaine CARD. La protéine ASC a donc deux domaines fonctionnels importants : PYR et CARD. L’interaction entre l’inflammasome et la protéine ASC induit l’oligomérisation des protéines ASC et aussi des pro-caspase-1 permettant l’auto-clivage de la pro-caspase-1 en caspase-1 active. L’activation de la caspase-1 aboutit à la production de l’interleukine (IL)-1β active, de l’IL-18 et au clivage de la gasdermine D. Les IL-1β et IL-18 sont des cytokines inflammatoires majeures. L’extrémité N-terminale de la gasdermine clivée est adressée à la membrane plasmique où elle forme un pore au travers duquel est sécrété l’IL-1β.
Une compétition bénéfique entre protéine ASC et ASC2
Dans ce travail, les auteurs ont identifié la présence d’une protéine ASC2 chez 13 espèces de chauves-souris. Cette protéine ASC2 n’est pas ou peu exprimée chez l’Homme. Elle ne possède pas de domaine CARD et a seulement le domaine PYR. Elle entre en compétition avec la protéine ASC pour se lier à l’inflammasome, ce qui empêche le recrutement des pro-caspase-1 et par conséquent la production de l’IL-1β mature et la réaction inflammatoire.
De fait, les auteurs ont montré que des souris sur-exprimant le gène ASC2 des chauves-souris développaient moins d’inflammation que des souris sauvages après une stimulation par des cristaux d’urate de sodium. De même, dans les modèles d’infection virale (virus influenza A, virus Zyka) la production de l’IL-1β était diminuée chez des souris sur-exprimant ASC2. La mortalité secondaire au virus influenza A était diminuée de moitié chez ces souris par rapport aux souris sauvages. De façon intéressante le couplage de cette protéine ASC2 à un vecteur permettant son entrée dans les cellules diminue l’activation de l’inflammasome. Il existe 26 résidus d’acide aminé différents entre les protéines ASC2 des chauves-souris et ASC2 humains. Par des expériences de mutagenèse dirigée, les auteurs ont identifié 4 résidus majeurs dans la fonction inhibitrice des ASC2 des chauves-souris. Le remplacement de ces 4 résidus dans la protéine ASC2 humaine induisait une augmentation de l’expression protéique et une inhibition de l’inflammasome.
ASC2 des chauves-souris est une protéine anti-inflammatoire puissante. Elle pourrait être testée pour traiter les maladies inflammatoires humaines.
Références :
1. Ahn et al. Bat ASC2 suppresses inflammasomes and ameliorates inflammatory disease. 2023, Cell 186 ; 2144-2159.
2. Wang L.-F. et al. Decoding bat immunity: the need for a coordinated research approach. Nat. Rev. Immunol. 21, 269–271 (2021)
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