Le retard apporté au diagnostic de bipolarité est favorisé par l’individualisation difficile des phases d’hypomanie et par la diversité du spectre bipolaire.
Caractéristiques féminines
La prévalence de la bipolarité est équivalente dans les deux sexes, mais la bipolarité féminine présente les caractéristiques suivantes :
La survenue d’un premier épisode dépressif caractérisé en post-partum serait en faveur d’une bipolarité.
Une durée significativement plus importante avec des symptômes dépressifs résiduels par rapport aux hommes
Une mauvaise tolérance des antidépresseurs chez certaines femmes déprimées avec induction d’un tableau se compliquant d’impulsivité, d’agitation et d’un risque suicidaire accru (« dépression agitée »). Le traitement repose alors sur les thymorégulateurs, notamment les antipsychotiques voire l’électroconvulsivothérapie.
Modalités évolutives : états mixtes et cycles rapides
Les manies dysphoriques et plus globalement les états mixtes, associant symptômes dépressifs et maniaques sont une expression clinique plus volontiers observée chez la femme. De même, les cycles rapides, définis par la succession d’au moins 4 épisodes thymiques (maniaque ou dépressif) par an surviennent dans 80 % des cas chez des femmes, avec souvent la mise en évidence d’un dysfonctionnement thyroïdien, clinique ou biologique. Un recours excessif aux antidépresseurs par rapport aux thymorégulateurs est incriminé dans la survenue accrue de ces deux formes symptomatiques. Il faut donc faire très attention au maniement des antidépresseurs pour traiter une dépression bipolaire, même sous couverture thymorégulatrice.
L’influence de la vie génitale
La découverte de la bipolarité se fait volontiers au cours de la grossesse et le post-partum. Les effets de la grossesse sur le cours naturel de la bipolarité restent encore mal caractérisés mais le risque de récidive et de chronicité est jugé élevé en cas d’arrêt du traitement thymorégulateur. Le taux de récidive dépressive ou maniaque du post-partum concernerait au moins une femme bipolaire sur deux. L’existence d’un antécédent familial de psychose du post partum constituerait un facteur de risque majeur. La femme bipolaire doit être particulièrement surveillée dans ces circonstances.
Périménopause et ménopause sont également considérées comme des périodes d’instabilité émotionnelle voire de décompensations thymiques.
Les comorbidités
Certains troubles anxieux sont plus fréquents chez la femme bipolaire : phobies spécifiques, trouble obsessionnel compulsif, et état de stress post-traumatique.
Le risque d’alcoolisme/vie entière est multiplié par 7,35 chez la femme bipolaire comparée à la population générale féminine.
Les particularités thérapeutiques
- Les thymorégulateurs
L’efficacité globale des thymorégulateurs ne semble pas varier entre les deux sexes. Ceci conduit encore aujourd’hui à considérer les sels de lithium comme le traitement le plus efficace avec la surveillance planifiée de sa bonne tolérance clinique et biologique.
La stratégie thérapeutique sera donc tributaire des contre-indications et précautions d’usage des trois types de thymorégulateurs, eu égard aux grandes périodes de la vie génitale.
Le risque tératogène du divalproate et de la carbamazépine est supérieur à celui des sels de lithium, avec un taux de maladie d’Ebstein revu à la baisse en cas d’administration au cours du premier trimestre. Le risque est moindre sans être nul avec la lamotrigine, dont l’indication actuelle se limite à la prévention des accès uniquement dépressifs. Des cas rares d’intoxication néonatale au lithium ont été rapportés chez le nouveau-né.
Selon les recommandations de l’Afssaps, la prescription de certains antipsychotiques de deuxième génération comme l’olanzapine serait envisageable durant la grossesse, en prenant garde au risque accru de syndrome métabolique.
Le risque de syndrome des ovaires polykystiques contre-indique l’usage du valproate chez la jeune fille de moins de 18 ans.
Bipolarité et grossesse
L’intérêt d’une grossesse planifiée est évident. Elle intègre au cas par cas, le risque de décompensation thymique face au risque tératogène potentiel du ou des thymorégulateurs prescrits. Elle permet de tenter un arrêt progressif des produits utilisés : 4 semaines pour le divalproate ou la carbamazépine, 6 semaines minimum à 3 mois pour le lithium. Toutes les décisions doivent être notées dans le dossier médical, y compris l’information délivrée.
L’allaitement est contre-indiqué avec ces divers traitements.
Bipolarité et contraception
Si le lithium et le valproate n’interfèrent pas pharmacologiquement avec une contraception hormonale, l’attention doit être attirée sur l’association avec la carbamazépine qui diminue l’efficacité contraceptive des œstroprogestatifs et progestatifs. Des cas de thrombose veineuse ont été aussi rapportés sous carbamazépine.
Quelle durée de traitement ?
Un consensus international s’accorde à instaurer un traitement thymorégulateur à visée préventive dès le premier accès maniaque sévère, c’est-à-dire aux conséquences sociales, familiales et professionnelles indubitables. Selon certains auteurs, un accès maniaque franc relève d’un traitement préventif à vie. Tout en constatant le peu de données en la matière, d’autres posent la question d’un arrêt possible après trois ou cinq années de lithiothérapie efficace.
Entretiens de Bichat. D’après la communication du Pr Jean- Marie Vanelle
(service de psychiatrie, CHU de Nantes, Hôpital Saint-Jacques)
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