Des soignants du pôle de psychiatrie de Moisselles manifestent pour dénoncer « un climat de représailles » après une alerte lancée lors de la première vague

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Publié le 23/06/2021
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Le 19 juin 2020, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), Adeline Hazan, publiait au « Journal officiel » un rapport dénonçant des « violations graves » des droits des patients hospitalisés dans l’établissement public de santé mentale (EPSM) Roger-Prévot de Moisselles (Val-d’Oise) lors de la première vague de l’épidémie de Covid-19, après l'alerte lancée par des professionnels du service. Depuis, les soignants du pôle des Hauts-de-Seine, rattachés à l’EPSM de Moisselles, décrivent une situation de tensions au sein du service qui pèse sur leur travail au quotidien.

Le 22 juin, une manifestation, organisée à l’appel de l'Union syndicale de la psychiatrie, de SUD Santé Sociaux et du Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie (CRPA), a eu lieu devant la mairie de Bois-Colombes, dont l’édile, Yves Révillon, préside le conseil de surveillance de l’établissement.

Les manifestants dénoncent une « chasse aux sorcières »

Les quelques dizaines de manifestants entendaient dénoncer le « climat de représailles qui a cours au sein de l'EPSM Roger-Prévot de Moisselles (Val-d'Oise) à l'endroit du pôle de psychiatrie adulte d'Asnières-sur-Seine », explique André Bitton, président du CRPA, dans un post publié sur « Mediapart ».

Ces tensions seraient nées du constat posé par Adeline Hazan après une visite le 18 mai 2020. « Des patients ont été enfermés à clé 24 heures sur 24 sans que leur état clinique psychiatrique le justifie, sans décision médicale écrite émanant d’un psychiatre ni traçabilité », condamnait alors la CGLPL, dans son rapport, décrivant par ailleurs les conditions « indignes » de ces « privations de liberté injustifiées et illégales. »

Craignant que ces pratiques ne soient appliquées dans d'autres établissements, Adeline Hazan avait également adressé des recommandations aux hôpitaux psychiatriques et au ministère de la Santé afin de lever « toute ambiguïté » entre le régime de « l’isolement psychiatrique » et « le confinement sanitaire » adopté pour lutter contre le Covid-19.

À Moisselles, la publication du rapport avait entraîné la mise en œuvre de « mesures destinées à provoquer une réflexion sur la privation de liberté », indiquait la CGLPL. Mais, depuis, la direction de l'établissement aurait mis en œuvre une « chasse aux sorcières », « cassant progressivement une équipe de psychiatrie qui a osé s'insurger contre la tournure carcérale sur ce site de nombre d'hospitalisations psychiatriques, y compris des hospitalisations libres sur demande des patients », déplore André Bitton.

Une délégation reçue par le président du conseil de surveillance de l'établissement

La direction de l’établissement est notamment accusée par les soignants présents lors de la manifestation, qui souhaitent garder l’anonymat, d’avoir mené une enquête administrative « à charge » contre la chefferie du pôle de psychiatrie. « L’équipe a voulu rencontrer les enquêteurs mais aucune audition n’a été menée », dénoncent les soignants, déplorant que « les discussions se passent dans des instances où nous ne sommes pas représentés ». Sollicitée par « Le Quotidien », la direction n’a pas souhaité réagir.

Une délégation de sept soignants du pôle de psychiatrie a été reçue par Yves Révillon. Ils souhaitaient d’abord être entendus, mais aussi parvenir à une « dépersonnalisation du conflit », alors que les encadrants du pôle sont la cible, selon eux, de la direction. « Une cadre supérieure de santé a été mutée, alors qu’elle était en arrêt de travail et le chef de pôle est menacé de non-renouvellement », expliquent-ils. Alors qu’un conseil de surveillance doit se tenir ce 24 juin, Yves Révillon entend plaider l’apaisement.


Source : lequotidiendumedecin.fr