MIEUX vaudrait ne pas s’en tenir à la principale conclusion, apparemment évidente, pour juger un travail américain sur l’apport des implants cochléaires chez les moins de 5 ans. En effet, John K. Niparko et coll. constatent un meilleur développement du langage parlé, que celui attendu, chez ces enfants. L’intérêt de l’étude est certes la confirmation de ce qui était fortement suspecté, mais aussi son analyse de la réussite thérapeutique.
En premier lieu, conscients que les études antérieures étaient essentiellement rétrospectives, les membres de l’équipe de recherche multicentrique ont opté pour la voie prospective. Ils ont enrôlé, entre novembre 2002 et décembre 2004, 188 enfants de moins de 5 ans, sourds sévères à profonds, implantés cochléaires et 97 témoins normo-entendants. Tous ont été suivis pendant trois ans.
Au terme de cette période l’implant cochléaire a permis une meilleure amélioration des performances du langage parlé que ne laissait présager le score pré-implantatoire. À trois ans, les enfants ont gagné 10,4 points par an dans la compréhension et 8,4 dans l’expression orale, contre 5,4 et 5,8 attendus. Cependant, ces jeunes patients n’atteignaient pas le niveau des enfants indemnes de même âge.
En outre, l’équipe constate que plus l’intervention a été réalisée précocement, plus la pente d’amélioration de la compréhension (1,1 point par année en moins) et de l’expression (1 point) est raide. Deux indices apparaissent tout particulièrement démonstratifs. Les performances des plus jeunes implantés se rapprochent de celles des normo-entendants ; à l’inverse, chez les plus âgés l’écart se creuse entre l’âge chronologique et celui du langage.
Des facteurs environnementaux.
Le travail américain suggère que l’implant ne fait pas tout. Il montre l’existence de facteurs environnementaux favorisant les performances. L’implication maternelle est associée à une acquisition des outils du langage parlé. La compréhension et l’expression sont influencées par une communication orale bidirectionnelle. Le niveau financier de la famille joue également en faveur de l’enfant, d’autant qu’il est souvent associé à un niveau scolaire plus élevé des parents ainsi qu’à un engagement marqué de leur part.
J. K. Niparko et coll. fournissent des éléments explicatifs. L’enfant implanté est davantage à même d’entendre les éléments phonétiques essentiels à la compréhension du langage parlé qu’un autre porteur d’aides auditives. Lorsque l’intervention est réalisée tôt dans la vie, elle tire profit de la plasticité neuronale à une période-clé pour les apprentissages fondés sur l’audition. En effet, à la naissance, le bébé est capable de discriminer tous les sons de tous les idiomes. L’aptitude se perd au fur et à mesure qu’il acquiert de la précision dans sa langue natale. Cette période se situe entre 7 et 10 mois. Entre 8 et 18 mois, l’enfant commence à identifier les éléments composant les mots de sa langue, ce qui rend possible leur apprentissage. Ces acquisitions requièrent, bien sûr, la mise en œuvre de connexions cérébrales. Or, chez l’enfant sourd sévère à profond, ces circuits ne sont guère stimulés, ce qui compromet le langage.
Un point, enfin, n’a pu être correctement exploré : l’implantation bilatérale. Le travail suggère que les enfants n’en tirent guère de bénéfice. Mais le délai entre la seconde intervention et la fin de l’étude a été trop bref pour y accorder de la valeur.
JAMA, 21 avril 2010, vol 303, n° 15, pp. 1 498-1 506.
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