Devant toute obésité sévère (IMC > 35) et/ou précoce (avant 6 ans), l’enfant doit être envoyé pour évaluation dans l’un des 37 centres spécialisés obésité (CSO). De même, en cas d’IMC > 30 avec une problématique psychosociale ou une comorbidité, l’adressage d’emblée est aussi recommandé.
En lien avec une maladie rare
Actuellement, seule la setmélanotide (Imcivree, Rhythm Pharmaceuticals) est indiquée et prise en charge, dans des formes rares d’obésité génétique (perte de la fonction biallélique de la pro-opiomélanocortine [POMC], dont le déficit en PCSK1 ou le déficit biallélique en récepteur de la leptine [LEPR]), dans le syndrome de Bardet-Biedl (rare également, il associe différentes anomalies, un déficit intellectuel et une obésité) ou dans l’obésité secondaire à une lésion de l’hypothalamus altérant la voie leptine-mélanocortine, principalement active au niveau de l’hypothalamus et régissant la satiété.
Le traitement est disponible en accès précoce dans les centres de référence maladies rares. « Il vient stimuler le récepteur cérébral MC4R, entraînant un signal de satiété. Actuellement, en France, moins de 200 enfants et adultes concernés ont été recensés depuis 2022. Néanmoins, il est important de savoir qu’un traitement existe pour ces enfants qui souffrent d’une obésité extrêmement sévère et très précoce, avec des complications à la clé », indique la Pr Béatrice Dubern (hôpital Armand-Trousseau, AP-HP). Les lésions de l’hypothalamus peuvent survenir à l’occasion d’une intervention pour retirer une tumeur dans cette zone, comme le craniopharyngiome. « Les zones du contrôle de la faim ayant été retirées, il peut s’ensuivre une obésité importante », précise-t-elle.
Concernant le syndrome de Prader-Willi, en revanche, ce traitement n’est pas indiqué et d’autres sont en cours de développement.
Dans les autres cas : le réseau avant tout
En pratique quotidienne, les médecins libéraux sont beaucoup plus souvent amenés à voir des jeunes en situation d’obésité moins sévère et moins précoce que celles en rapport avec une maladie génétique. Surveiller les courbes de corpulence des enfants, s’interroger sur des accélérations de la courbe d’IMC, est donc essentiel. Il faut parler du poids avec la famille, mais sans être trop alarmiste ni stigmatisant – « Combien de parents s’entendent dire qu’ils sont maltraitants, ce qui est très culpabilisant », souligne la Pr Dubern –, et avoir identifié des structures à proximité pour prendre si besoin le relais.
Le poids des mots
Dans les livres scolaires, souvent, l’obésité n’est encore expliquée que par le prisme des mauvaises habitudes alimentaires. Et, dans de nombreux ouvrages de la littérature, l’enfant en situation d’obésité est moqué (appelé « Porcinet » dans Sa majesté des mouches, de William Golding). De quoi favoriser le harcèlement dont sont trop souvent victimes ces enfants.
Si la famille est demandeuse, le programme « Mission : retrouve ton cap » permet aux 3-12 ans en situation de surpoids de bénéficier d’une prise en charge précoce et pluridisciplinaire par l’Assurance-maladie. Pour les enfants qui sont plus âgés ou pour lesquels il n’y a pas de « Mission : retrouve ton cap » à proximité, il est possible de s’appuyer sur les réseaux de prévention et de prise en charge de l’obésité pédiatrique (Réppop), dans lesquels sont accessibles des médecins, diététiciens, psychologues, etc. Il existe enfin des expérimentations (dispositifs Article 51) dont certaines sont dédiées à l’obésité.
Indiquer des médicaments sans les rembourser induit une discrimination des familles
Pr Béatrice Dubern
Des médicaments peu accessibles
Dans l’obésité non liée à une maladie rare, seuls deux médicaments sont actuellement disponibles, pour les plus de 12 ans (liraglutide, sémaglutide) ; leur prescription est réservée aux pédiatres et médecins nutritionnistes endocrinologues. Les résultats d’essais randomisés montrent des pertes de poids identiques à celles retrouvées chez les adultes (autour de 15 %) et des effets secondaires similaires (principalement digestifs). En revanche, il n’existe pas d’étude en vie réelle à ce jour et plusieurs questions restent encore sans réponse : pour quels candidats (uniquement ceux en échec de toutes les autres prises en charge, ceux devant être opérés mais nécessitant une perte de poids avant chirurgie, etc.) ? pendant combien de temps ? avec quels effets potentiels à long terme ? « Ces médicaments représentent un espoir pour certains patients, mais ils ne sont pas pris en charge et représentent un coût mensuel de 300 à 400 €. C’est un frein majeur pour les familles et c’est un point discriminant. Il faudrait que l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) statue sur ces médicaments chez les moins de 18 ans », plaide la Pr Dubern.
Entretien avec la Pr Béatrice Dubern (hôpital Armand-Trousseau, AP-HP)

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