L'étude française D-lay-MS révèle qu'une supplémentation en vitamine D à forte dose réduit significativement l'activité de la sclérose en plaques (SEP) à un stade précoce. Publiés ce 10 mars dans le Journal of the American Medical Association (Jama), ces travaux menés sur une décennie (2012-2022) au sein de 36 centres experts apportent des résultats inédits dans la lutte contre cette maladie auto-immune.
Depuis les années 1960, les scientifiques ont observé une corrélation entre l'exposition au soleil et la fréquence de la sclérose en plaques, les pays nordiques enregistrant une incidence environ quatre fois plus élevée que le sud de l'Europe. Cette constatation a conduit à de nombreuses recherches sur les effets d'une supplémentation en vitamine D. Cependant, faute de cohortes suffisamment importantes et de protocoles plus précis, aucune étude n'avait jusqu'à présent pu prouver un effet sur la progression de la maladie.
Dans ce contexte, une équipe coordonnée par le Pr Éric Thouvenot, neurologue au CHU de Nîmes, chercheur à l'Institut de Génomique fonctionnelle de Montpellier et enseignant à la faculté de médecine Montpellier-Nîmes, a entrepris l’étude D-Lay-MS. Pendant huit ans, 303 patients, dont 157 sous vitamine D et 146 sous placebo, ont été suivis sur une période de deux ans.
Deux ampoules à 100 000 UI par mois
Les résultats sont significatifs : la prise de deux ampoules de vitamine D par mois (100 000 UI à chaque fois), a permis de ralentir l'activité de la maladie. Le délai médian avant l'apparition d'une nouvelle lésion ou d'une poussée a presque doublé chez les patients traités : 432 jours pour les patients sous vitamine D contre 224 jours pour le groupe placebo. De plus, 60,3 % des patients sous vitamine D n'ont présenté aucune nouvelle activité clinique ou radiologique de la maladie, contre 74,1 % dans le groupe placebo, soit une réduction du risque relatif d'activité de la maladie de 34 %. « Il s'agit d'un taux proche des traitements ayant la plus faible efficacité dans la maladie », souligne le Pr Thouvenot.
L'étude s'est concentrée sur des patients en début de maladie, avec une moyenne d'âge de 34 ans et une majorité de femmes (70 %). Aucun effet indésirable n'a été constaté, notamment grâce à une sélection rigoureuse excluant les individus ayant déjà un taux élevé de vitamine D. « Nous avons également veillé à ce que l'effet de la supplémentation ne soit pas biaisé par d'autres traitements de fond de la pathologie », précise le neurologue.
Un argument de plus pour supplémenter les enfants
Bien que ces résultats ne devraient pas suffire à faire de la vitamine D un traitement remboursé par l'Assurance-maladie contre la SEP, ils confirment un effet immunomodulateur. « C'est un résultat très important, notamment pour les pays où l'accès aux traitements de fond est limité pour des raisons économiques », affirme le Pr Thouvenot. Il plaide également pour une prise préventive et régulière de vitamine D dès l'enfance, et jusqu'à l'adolescence, afin de réduire le risque de cette maladie.
Hormis les patients atteints de tuberculose ou de sarcoïdose, qui pourraient développer une hypercalcémie ou des calculs rénaux, la prise régulière de vitamine D ne présente pas de risque majeur. « Jusqu'à une ampoule toutes les deux semaines, il n'y a aucun danger connu », assure le spécialiste.
Avec un financement public de 1,47 million d'euros à son lancement en 2012, ce projet hospitalier de recherche clinique (PHRC) figurait parmi les plus ambitieux de son époque. Forts de ces résultats encourageants, les chercheurs ont d'ores et déjà soumis un nouveau dossier PHRC pour inclure 450 patients dans une nouvelle étude. L'objectif est de déterminer si la vitamine D, en complément des traitements existants, présente un effet dans la prise en charge de la sclérose en plaques à l'échelle de la population de patients.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024