La littérature retrouve de nombreux travaux suspectant une association entre insuffisance rénale aiguë (IRA) et lésions biochimiques et pathologiques cérébrales chez le sujet âgé. Une étude suédoise publiée dans Neurology s’est intéressée à la question et retrouve une association entre IRA et démence dans une cohorte de plus de 300 000 personnes âgées de 65 ans et plus.
Si l’étude ne s’est pas attelée à préciser le mécanisme physiopathologique sous-jacent, les auteurs projettent de le faire et émettent des hypothèses, souhaitant à terme « évaluer si différents médicaments, changements de mode de vie et procédures de surveillance après une insuffisance rénale aiguë peuvent réduire le risque de développer une démence ». Ce travail a été réalisé dans le cadre du projet Stockholm Creatinine Measurement (Scream) en Suède.
Un risque de démence augmenté de 49 % après une IRA
Les chercheurs ont inclus 305 122 individus d’âgé médian 75 ans, sans antécédent de démence. Durant le suivi de 12,3 ans en médiane, environ un participant sur quatre avait connu au moins un épisode d’IRA et le diagnostic de démence a été posé chez 16 %. Les auteurs retrouvent un taux de démence après une IRA de 37 cas pour 1 000 personnes-années, ce qui était environ le double de celui observé sur la période avant IRA (17, 3). Après ajustement multivariable, ils concluent à un risque 49 % plus élevé de développer un quelconque type de démence chez ceux ayant eu un épisode d’IRA que ceux n’en ayant pas eu.
La comorbidité la plus rencontrée chez les individus déments ayant eu une IRA était l’hypertension avec une prévalence de 69,3 % (prévalence de 35,9 % dans la population totale de l’étude). Les bêtabloquants, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine et les bloqueurs des récepteurs de l’angiotensine II étaient les molécules les plus rapportées.
Les auteurs observent après une IRA, un risque augmenté de 88 % pour la démence à corps de Lewy (DCL) et la maladie de Parkinson (MP), de 47 % pour la démence vasculaire et de 31 % pour la maladie d’Alzheimer. Enfin, plus les lésions rénales consécutives à l’épisode d’IRA étaient sévères avec nécessité d’hospitalisation ou de soins, plus le risque de démence augmentait. À ce titre, les auteurs retrouvent 64,1 % de maladie rénale chronique au stade 3-5 parmi les individus déments.
Des hypothèses physiopathologiques
Ainsi, « l'identification des lésions rénales aiguës comme facteur de risque de démence peut conduire à une intervention plus précoce, à un traitement préventif et à de meilleurs soins pour les patients », expliquent les auteurs.
Si le lien entre démences de type vasculaire et IRA semble plus aisé à faire en termes de mécanismes physiopathologiques du fait des similitudes et synergies potentielles vasculaires, il est plus compliqué à faire pour les démences à corps de Lewy ou la maladie de Parkinson. Cependant, les auteurs font remarquer que, dans ces situations, il y a aussi une coexistence des pathologies cérébrovasculaires qui s’accentue avec l’âge, ainsi qu’une dénervation sympathique cardiaque post-ganglionnaire et des dysfonctions autonomiques, des éléments partagés avec l’IRA.
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