Les infections liées aux cathéters sont la troisième cause d’infection à l’hôpital, derrière le poumon et le système digestif, assure le Pr Olivier Mimoz, chef du service de réanimation chirurgicale du CHU de Poitiers. « Le risque zéro n’existe pas, mais dans ces infections où le rôle du soignant est clef dans la pose du cathéter, on peut tendre à zéro », assure-t-il.
Comment ? En préférant comme antiseptique la chlorhexidine alcoolique à 2 % (CHG-OH) à la povidone iodée alcoolique à 5 % (PVI-OH), tout en abandonnant le dogme d’une détersion en 4 temps, chronophage sans être plus efficace.
Diminution de 84 % de risque d’infection liée aux soins
Le Pr Olivier Mimoz a comparé, dans le cadre de l’étude CLEAN*, 4 stratégies antiseptiques : préparation des cathéters avec de la CHG-OH ou de la PVI-OH, avec pose en un temps ou en quatre (nettoyage de la peau avec détergent antiseptique, rinçage à l’eau stérile, séchage avec compresses, puis application de l’antiseptique). Quelque 2 349 patients adultes, admis dans une des 11 unités de réanimation de l’étude, reliés à un cathéter artériel, veineux central, ou d’épuration extra-rénale, ont été inclus entre octobre 2012 et février 2014 dans cette étude multicentrique et randomisée. Près de 5 160 cathéters ont été analysés par les experts. Les résultats montrent que l’usage de la CHG-OH par rapport à la PVI-OH est associé à une diminution de 82 % du risque de colonisation des cathéters, avec une densité d’incidence de 3,34 pour 1 000 jours-cathéters(versus 18,74 pour la povidone). Il est aussi associé à une baisse de 84 % des infections liées aux soins, avec une incidence de 0,28 vs 1,77 pour 1 000 jours-cathéters. Le risque d’infection bactériémique descend lui de 79 % (0,28 vs 1,32).
En revanche, des réactions cutanées sévères sont survenues plus fréquemment avec la chlorhexidine alcoolique (2,6 % des patients vs 0,7 %).
Par ailleurs, la densité d’incidence de la colonisation des cathéters, des infections liées aux soins, et des infections bactériémiques ont été comparables entre une procédure en un ou en quatre temps, montre l’étude.
Vers l’évolution des recommandations et des pratiques
Le Pr Mimoz espère que l’étude CLEAN entraînera une révision d’ici 2016 des recommandations émises par la société française d’hygiène hospitalière (SF2H) en 2004 et 2013, afin que la France ne soit plus le seul pays à pratiquer une détersion en 4 temps. Une analyse médico-économique de l’usage de la chlorhexidine alcoolique à 2 % devrait suivre, mais selon le Pr Mimoz, le dispositif serait coût-efficace. « À 2,50 euros la désinfection cutanée avec de la chlorhexidine, contre 1,50 euro pour la povidone, on estime à 227 euros le coût de la prévention d’une infection de cathéter. C’est peu lorsqu’on sait qu’une telle infection coûte plus de 19 000 euros », explique-t-il.
L’anesthésiste envisage enfin de lancer une étude semblable sur les infections du site opératoire. Il considère aussi que les résultats pourraient en théorie être extrapolés à tout type de cathéters ou de prise en charge, y compris en ambulatoire. Anesthésiste-réanimateur à l’Institut Curie, le Dr Irène Kriegel attend beaucoup d’un changement de pratiques. Depuis 2010, elle a convaincu ses collègues d’utiliser de la CHG-OH. « Les soignants sont observants car le dispositif est simple, presque ludique. Ils attendent de pouvoir l’adopter au bloc pour aller plus vite », témoigne-t-elle.
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