Même si le dispositif français pour le coronavirus est centré sur le 15, l’actualité récente a montré que les généralistes pouvaient se retrouver en première ligne. Un constat qui soulève des questionnements quant à la protection des praticiens et au risque de transmission de l’infection en médecine de ville.
« En cas de signes d’infection respiratoire (fièvre ou sensation de fièvre, toux, difficultés respiratoires) dans les 14 jours suivant votre retour de Chine, ne vous rendez pas chez votre médecin ou aux urgences, appelez le 15 en signalant votre voyage ». Depuis le début de l’épidémie chinoise d’infection à coronavirus 2019-nCoV, les autorités sanitaires françaises n’ont eu de cesse d’inviter patients et professionnels à contacter le Samu au moindre doute, sans passer par la case médecine de ville.
Si le message a été largement relayé, l’actualité récente a montré que les soins primaires pouvaient pourtant se retrouver en première ligne.
Un généraliste parmi les premiers cas français
Ainsi, le premier cas autochtone français n’était autre qu’un généraliste exerçant au sein de SOS 92. De même, l’un des premiers cas de coronavirus détecté en France avait fait l’objet d’une consultation par un médecin généraliste au centre de consultations de SOS Médecins Bordeaux. Et dans le récent cluster des cinq cas observés aux Contamines-Montjoie, en Haute-Savoie, les médecins de famille on été là encore au premier plan.
Preuve que malgré toutes les précautions, certains patients contaminés passeront toujours à travers les mailles du filet. Soit qu’ils se présentent spontanément au cabinet, soit qu’ils ne soient pas identifiés comme tels. Alors que la situation est très labile, la définition de cas possibles évolue régulièrement, avec au fil du temps une expansion des zones à risque et des symptômes évocateurs pour coller au maximum à la réalité épidémiologique. Malgré cela, on ne parvient pas toujours à identifier les situations à risque. Comme pour le généraliste du 92, contaminé non pas par les patientes qu'il avait prises en charge mais par leur interprète ! Dans ce contexte, « la régulation ne sera jamais fiable à 100 % », résume l’un des confrères de ce médecin des Hauts-de-Seine touché par le virus.
Inquiétudes et interrogations sur le terrain
Si, pour le moment, ces épisodes restent rares et n’ont pas eu de conséquences graves, ils soulèvent des interrogations et des inquiétudes quant à la protection des praticiens et au risque de transmission de l’infection en médecine de ville. « Nous sommes certes au service de la population, mais pas au point de mettre en péril notre exercice ni notre famille », s’inquiète un lecteur du Généraliste sur internet. « Le gouvernement se fiche tellement de ses médecins libéraux qu'il les laisse sans possibilité de se protéger », renchérit un autre internaute.
De fait, à ce jour, les autorités sanitaires ne se sont pas montrées particulièrement préoccupées par le risque d’exposition en médecine de ville. Les recommandations officielles effleurent à peine la question. Et même du côté des syndicats de généralistes, pas d’informations spécifiques : un renvoi à DGS-Urgent pour MG France, rien sur les sites de l’UFML-S et de la CSMF-généralistes. Seul le SNJMG propose sur un blog pratique et actualisé sur l’épidémie.
Le décès, la semaine dernière, du médecin chinois ayant sonné l’alerte à Wuhan le rappelle pourtant : lors d’épidémies émergentes, les professionnels de santé sont souvent les premiers touchés. Selon un article récent du Jama, sur 138 patients hospitalisés pour infection par le 2019-nCoV dans un hôpital de Wuhan, les soignants représentaient près d’un tiers (29 %) des personnes contaminées.
Les MG davantage impliqués à l'étranger ?
Alors que le dispositif français est centré sur le 15, dans la plupart des autres pays francophones, les médecins généralistes sont un rouage essentiel de la prise en charge des patients suspects d’infection par le 2019-nCoV. Ainsi, en Suisse, si un patient pense être infecté, il doit en premier lieu appeler son généraliste (et non les services de secours comme en France). C’est le généraliste qui le guide vers la procédure adaptée. En Belgique aussi, il est conseillé d’appeler son généraliste. Au Québec, les recommandations de prise en charge sont calquées sur celles de 2013 pour le MERS-CoV, avec une collaboration entre médecin traitant et services d’infectiologie pour maintenir si possible les patients à domicile.