Ce que doit faire l’ovaire pour exister

Publié le 31/01/2014
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Crédit photo : Phanie

Tout s’explique… La voie de développement femelle a été longtemps considérée comme une voie de différenciation « par défaut » : au cours du développement normal, la formation des testicules ou des ovaires chez les fœtus mammifères dépend de la présence ou de l’absence du gène SRY, porté par le chromosome Y. Mais il y a des exceptions à la règle, des cas d’inversion sexuelle, où les fœtus porteurs de deux chromosomes X, donc programmés pour développer un ovaire, naissent avec les attributs mâles.

Des chercheurs de l’INRA de Jouy-en-Josas qui étudient ces cas depuis une dizaine d’années, ont mis en évidence l’importance d’un autre gène, FOXL2 (forkhead-transcription factor), porté par un chromosome non sexuel (autosome) dans l’apparition de mâles XX dans certaines espèces animales domestiques comme la chèvre. Les premiers travaux montraient en effet qu’une mutation ponctuelle empêchant l’expression de FOXL2 et d’ARN non codant entraînait la naissance de fœtus sans corne et présentant une inversion du sexe.

Un modèle pour étudier l’insuffisance ovarienne

Dans une nouvelle expérience publiée dans la dernière édition de Current Biology, les chercheurs ont réussi grâce à de nouvelles techniques génétiques à supprimer le gène FOXL2 dans des embryons de chèvre : les fœtus XX, dépourvus du gène FOXL2, développent des testicules à la place des ovaires. « À la naissance, les animaux ont un sexe externe masculinisé, explique Eric Pailhoux, un des auteurs, et ont un comportement mâle tout à fait normal à la puberté. En revanche, ils ne font pas de spermatogenèse, et la testostérone s’épuisant, les testicules deviennent hypoplasiques... » FOXL2 agit comme un facteur de transcription régulant d’autres gènes (aromatase) intervenant dans la différenciation ovarienne précoce, avant la méiose des cellules germinales, mais « ne permet pas d’expliquer l’inversion sexuelle chez l’homme », poursuit le chercheur.

En revanche, les hétérozygotes porteurs d’une copie mutée du gène FOXL2 seraient de bons modèles pour expliquer et tester l’insuffisance ovarienne chez la femme. Ces modèles ont d’ores et déjà été clonés par l’équipe de Jouy-en-Josas pour contourner la technique de suppression du gène, longue et difficile. Les homozygotes n’ont pas d’utilité, ils meurent très tôt.

À noter que l’inactivation de FOXL2 chez la souris n’a aucune conséquence. Ce qui signifie que la souris – au moins au stade d’ovaire précoce – ne serait pas un bon modèle pour étudier le rôle des perturbateurs endocriniens.

Current Biology, 30 janvier 2014

Dr Anne Teyssédou-Mairé

Source : lequotidiendumedecin.fr