Transfert du grand-dorsal

Un ultime recours dans les ruptures massives

Publié le 09/11/2015
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Figure 1. Vue postérieure d’épaule : la coiffe des rotateurs postérosupérieure intègre SE : supra...

Figure 1. Vue postérieure d’épaule : la coiffe des rotateurs postérosupérieure intègre SE : supra...
Crédit photo : Dr A. Jacquot

Figure 4. Préparation du grand dorsal : Libération du muscle. Section du tendon au ras de l’humérus

Figure 4. Préparation du grand dorsal : Libération du muscle. Section du tendon au ras de l’humérus
Crédit photo : Dr A. Jacquot

Figure 5. Fixation du tendon au trochiter par ancres et points trans-osseux

Figure 5. Fixation du tendon au trochiter par ancres et points trans-osseux
Crédit photo : Dr A. Jacquot

Figure 3. Le muscle grand dorsal

Figure 3. Le muscle grand dorsal
Crédit photo : Dr A. Jacquot

Figure 1. Vue postérieure d’épaule : la coiffe des rotateurs postérosupérieure intègre SE : supra...

Figure 1. Vue postérieure d’épaule : la coiffe des rotateurs postérosupérieure intègre SE : supra...
Crédit photo : Dr A. Jacquot

La rupture de la coiffe des rotateurs est une pathologie fréquente. Parfois asymptomatique, elle occasionne souvent au cours de son évolution douleur, perte de force et des mobilités actives. Le nombre des réparations pratiquées a presque triplé ces vingt dernières années, mais jusqu’à 10 % des ruptures de coiffe rencontrées sont massives et irréparables (rétraction du tendon au niveau de la glène, infiltration graisseuse des muscles stade 3 ou supérieur). Lorsque la réparation est possible, le taux de rupture itérative rapporté avoisine tout de même 25 %, malgré l’évolution des techniques et des implants. Et en cas de reprise pour rupture itérative, la cicatrisation tendineuse n’est pas obtenue dans 50 à 75 % des cas, rendant cette chirurgie de révision à haut risque d’échec.

Des indications sélectives

Dans les situations où la chirurgie réparatrice échoue ou est impossible, la chirurgie palliative est envisagée.

Le traitement arthroscopique simple (débridement, acromioplastie, ténotomie du biceps, réparation partielle...) peut donner de bons résultats, mais le soulagement obtenu se dégrade souvent au cours du temps.

Dans de nombreux cas, la prothèse inversée est la solution de choix. Cet implant, développé en France dans les années 1980, a aujourd’hui bien démontré son efficacité et sa fiabilité dans le traitement des arthropathies d’épaule à coiffe rompue. Mais la proposer à des patients de moins de 60 ans reste encore aujourd’hui sujet à débat.

C’est donc chez des patients jeunes et actifs, souffrant d’une rupture postérosupérieure (supra-épineux et infra-épineux +/- petit-rond) de coiffe symptomatique et irréparable, que le transfert de grand dorsal trouve sa meilleure indication. Les symptômes associent classiquement douleurs, perte de force en élévation antérieure, et/ou perte de la rotation externe active.

La perte complète de l’élévation antérieure (épaule pseudo-paralytique) est considérée par beaucoup comme une contre-indication, et doit en tout cas inciter à la prudence au vu de résultats très mitigés dans ces cas, qui relèvent plutôt de la prothèse inversée. Le sous-scapulaire doit être intègre pour réaliser le transfert de grand-dorsal, les résultats étant nettement inférieurs en cas de rupture irréparable, considérée aussi comme une contre-indication. En cas de rupture réparable du sous-scapulaire, le transfert peut être proposé, associé à une réparation tendineuse, sans retentissement sur le résultat final.

En marge de ce cadre bien précis, le transfert de grand-dorsal peut être parfois proposé en association avec une prothèse inversée pour omarthrose excentrée, en cas de perte de la rotation externe active en pré-opératoire.

Un parcours balisé

Le principe biomécanique de la procédure chirurgicale est de transférer un muscle adducteur et rotateur interne (grand dorsal), dans une nouvelle position qui lui confère un rôle opposé, d’abaisseur de la tête humérale et de rotateur externe (lire encadré). Le grand dorsal vient alors potentialiser le deltoïde dans les mouvements d’élévation antérieure et de rotation externe, fonction qui n’est plus assurée par la coiffe déficiente.

En postopératoire, le patient est immobilisé 6 semaines sur une attelle d’abduction. Les mobilisations passives au-dessus du plan de l’attelle sont débutées immédiatement. Les mobilisations actives sont différées à 6 semaines, et la reprise des gestes quotidiens à 3 mois. Six à douze mois sont généralement nécessaires à l’acquisition du résultat.

Des résultats honorables

Les résultats sont bons, le taux de satisfaction avoisine 80 % dans les différentes séries. Une amélioration des douleurs, des mobilités actives (élévation antérieure et rotation externe) et de la force musculaire est constamment rapportée par les auteurs, y compris à long terme (10 ans, Gerber et al.). Il semble toutefois que les résultats soient moins bons chez les patients ayant fait l’objet d’une tentative de réparation tendineuse préalable. Les ruptures secondaires du transfert ne sont pas exceptionnelles (44 %) et influencent nécessairement le résultat clinique à long terme. Cela souligne l’importance de la technique opératoire (libération musculaire, fixation du tendon) et du protocole d’immobilisation et de rééducation postopératoire.

D’après la table ronde dirigée par les Dr Adrien Jacquot (Nancy), Dr Jean Kany (Toulouse) et Pr Daniel Molé (Nancy) avec la participation des Pr Guillaume Herzberg (Lyon), Dr Laurent Nové-Josserand (Lyon), Dr Philippe Valenti (Paris), Pr Christian Gerber (Zurich, Suisse)
Dr Adrien Jacquot sous la coordination du Pr Charles Msika

Source : Le Quotidien du Médecin: 9448