Le CHU de La Réunion devient le premier établissement ultramarin à réaliser des greffes cardiaques

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Publié le 03/04/2024
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Plus de 56 ans après la première greffe cardiaque, réalisée à Cape Town, en Afrique du Sud, le CHU de La Réunion est le premier département ultramarin à acquérir cette compétence en transplantation.

De gauche à droite : le Dr Clément Bourguignon, le Pr Éric Braunberger, Lionel Calenge (DG du CHU), Gérard Cotellon (DG ARS), le Pr Peter von Théobald (président de la CME) et le Dr Boris Boulanger, anesthésiste-réanimateur

De gauche à droite : le Dr Clément Bourguignon, le Pr Éric Braunberger, Lionel Calenge (DG du CHU), Gérard Cotellon (DG ARS), le Pr Peter von Théobald (président de la CME) et le Dr Boris Boulanger, anesthésiste-réanimateur
Crédit photo : DR

« Pour un si petit territoire, aussi isolé, c'est une vraie prouesse », estime le Pr Éric Braunberger, chef du service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire du site nord du CHU de La Réunion. La transplantation cardiaque est un exercice délicat en matière de timing et de coordination multidisciplinaire, a fortiori sur une île. Jusqu’à présent, « la majorité des patients réunionnais qui avaient besoin de cette opération y renonçaient, en raison de l’obligation de partir plusieurs semaines voire plusieurs mois en métropole loin de leurs proches. Cette perte de chance était une injustice qu’il fallait corriger. Maintenant on peut enfin permettre aux Réunionnais d’accéder au même niveau de prise en charge chirurgicale qu’en métropole », affirme le chirurgien, soulignant que les pathologies cardiovasculaires sont la première cause de décès dans l'île, en raison d’un taux de diabète, d’obésité et d’insuffisance rénale beaucoup plus élevé qu’en métropole.

Il a fallu quinze ans pour que ce projet de greffe cardiaque, né en 2010 à l'instigation du Dr Jean-François Delambre, chirurgien cardiaque, devienne enfin une réalité au cours de l’année 2023. Ces années ont permis au centre hospitalier départemental de devenir CHU en 2012 et de se doter des effectifs indispensables. « Quand je suis arrivé à La Réunion en 2017, il n’y avait que 4 cardiologues dans le service. Aujourd’hui, nous sommes 15 », précise le Dr Jérôme Corré, chef du service de cardiologie au CHU.

La Pitié Salpêtrière en soutien

Les équipes médicales et paramédicales sont allées se former à Paris l’année dernière, dans le service du Pr Pascal Leprince, à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière (AP-HP). Un partenariat qui reste actif via la visio-conférence pour décider de l’éligibilité et du suivi des patients sélectionnés.

En parallèle de la formation, un protocole s'est monté autour de l'évaluation des cas éligibles, mais aussi de l'impératif de coordination multi-services et de la mise en place d'un comité de pilotage multidisciplinaire. « Pour évaluer la solidité de notre organisation, une simulation grandeur nature a été organisée fin août, réunissant les services de chirurgie, d’anesthésie-réanimation, de cardiologie, les prestataires et les services de police », explique Lionel Calenge, directeur général du CHU de La Réunion. Cette simulation a permis notamment de vérifier que deux heures et demie suffisaient dans les pires conditions routières pour transférer un cœur du site sud du CHU à celui du nord.

Un transfert en métropole encore nécessaire pour 10 % de patients

Puis une première transplantation cardiaque a eu lieu (la date précise n’est pas communiquée afin de respecter l’anonymat du donneur), suivie de quatre autres, toutes avec succès. « Six autres patients sont sur la liste d'attente, avec une moyenne d'âge de 50 ans », confirme le Dr Clément Bourguignon, cardiologue.

Si la greffe cardiaque est désormais disponible à La Réunion, 10 % des patients éligibles nécessiteront encore un transfert en métropole en fonction de leurs profils immunitaires. Une douzaine de patients en moyenne par an sont susceptibles de subir une greffe cardiaque sur l’île. Mayotte, pour l’instant, relève encore de la métropole. Selon nos informations, les Antilles réfléchiraient à la mise en place de la même compétence dans les années à venir.

Mireille Legait, correspondante à La Réunion

Source : lequotidiendumedecin.fr