Les résultats de l’étude publiée dans la revue « The Lancet » suggérant un surrisque de cancer de l’ovaire chez les femmes prenant un traitement hormonal de la ménopause, doivent être interprétés avec prudence, selon le Dr Lydia Marié-Scemama, gynécologue-obstétricien, vice-présidente de l’association française pour l’étude de la ménopause (AFEM).
LE QUOTIDIEN - L’étude publiée dans le « Lancet » suggère une augmentation du risque de cancer de l’ovaire chez les femmes prenant un traitement hormonal. Faut-il s’en inquiéter ?
Dr Lydia MARIÉ-SCEMAMA - Il faut d’abord insister sur le fait que le cancer de l’ovaire est un cancer rare, son risque de survenue est très faible : 4 600 cancers de l’ovaire par an en France, contre 50 000 cancers du sein. Cet article met en avant pour certaines tranches d’âge, au maximum une augmentation de 0,5 pour 1 000 pour 5 ans. De plus, ses résultats doivent être interprétés avec précaution.
Quelles en sont les limites ?
Le rapport du « Collaborative Group on Epidemiological Studies of Ovarian Cancer » porte sur une métaanalyse de 52 études observationnelles, dont un grand nombre sont très anciennes. Il n’y a aucune donnée concernant les molécules utilisées, les doses et voies d’administration.
L’Etude E3N (Éducation nationale, INSERM) n’a jamais mentionné ce fait. Il s’agit pourtant d’une étude de cohorte reconnue internationalement ayant suivant 100 000 Françaises volontaires depuis 1990. E3N a montré qu’il n’existait pas de relation entre le fait de prendre un THM et la survenue d’un cancer du sein à condition d’utiliser une association : estrogènes et progestérone naturelle micronisée ou son isomère, la dydrogestérone.
Il faut également souligner que les femmes traitées sont beaucoup mieux suivies, il pourrait donc s’agir aussi d’un biais de dépistage.
Des experts du NIH (National Cancer Institute, National Institutes of Health) précisent aussi que la plupart des données sont de 2001 et que les protocoles ont été depuis modifiés. En quoi ont-ils changé ?
Depuis les résultats de la WHI, la prescription d’un THM est très encadrée. Les doses utilisées sont plus faibles, les produits différents, les voies d’abord diverses.
Les sociétés savantes internationales s’accordent pour favoriser l’emploi de l’estradiol, notamment par voie transcutanée, de préférence associé à progestérone naturelle micronisée ou à la dydrogestérone sauf en cas d’hystérectomie. L’AFFSAPS en 2003 et plus récemment l’HAS en juillet 2014 ont émis des recommandations à ce sujet. Quant à l’AFEM, elle conseille toujours la prudence et le respect de ces recommandations.
En pratique, que faut-il dire aux femmes ?
En ce qui concerne la ménopause, la relation médecin-patientes prend toute son importance. Les femmes sont souvent informées et volontaires. Il nous faut apporter une réponse personnalisée à chacune d’elles. Les doses utilisées doivent être minimales afin de soulager les signes climatériques qui altèrent de façon importante leur qualité de vie. La balance bénéfice risque doit être expliquée, la prescription se devant d’être réévaluée régulièrement, au moins une fois par an.
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