La probabilité de dissémination de cellules tumorales lors d’une biopsie de néoplasie, reconnue et décrite pour certains cancers comme celui de la vessie, semble extrêmement faible lors d’une biopsie prostatique, explique le Pr Jacques Irani (service d’urologie, CHU de Poitiers).
Le potentiel d’implantation et de dissémination (en général et sur un trajet de biopsie en particulier) dépend du type cellulaire. Les cellules urothéliales néoplasiques de haut grade ont un potentiel d’implantation fort qui contre-indique formellement l’ouverture d’une voie urinaire tumorale, pas celles des adénocarcinomes. Les masses tissulaires rénales (80 % d’adénocarcinomes) et prostatiques (plus de 90 % d’adénocarcinomes) sont donc largement explorées par biopsie.
Néanmoins, le risque de dissémination ne peut être écarté : l’aiguille doit franchir des tissus pour atteindre la prostate et en revenir. Le système de « guillotine » de l’aiguille actuelle protège théoriquement les tissus traversés d’une dissémination au retrait de l’aiguille en enfermant la carotte dans un cylindre métallique.
Peu de cas rapportés dans la littérature
Pour évaluer le risque de dissémination, aucune étude expérimentale (randomisée) ne compare différentes techniques de biopsie, ou la biopsie à l’absence de biopsie. Le nombre de cas rapportés (2-10) est faible (inférieur à 100) comparé aux quelques millions de biopsies réalisées depuis plus de 15 ans dans le monde. En France où 71 600 nouveaux cas de cancer de prostate ont été diagnostiqués en 2010, le Pr Jacques Irani estime que « 150 000 biopsies prostatiques ont dû être réalisées si l’on compte 40 % de biopsies positives, des biopsies itératives et peu de cancers découverts sur résection endoscopique ».
L’analyse des cas de dissémination retrouve plusieurs cas de tumeurs neuroendocrines de la prostate (‹1 % des tumeurs prostatiques). Ces tumeurs ont un PSA bas, discordant avec la clinique (10).
Des facteurs de risque sont suggérés dans la littérature (2-10), mais de façon non consensuelle (11,12) : utilisation d’aiguilles qui n’enclosent pas la carotte biopsique, tumeurs volumineuses déjà métastatiques, tumeurs peu différenciées, voie périnéale. « S’ils sont cohérents avec les connaissances physiopathologiques, le niveau de preuve est faible », remarque le Pr Irani.
Il n’y a actuellement pas d’alternative à la biopsie prostatique pour établir le diagnostic de cancer de prostate. Mais, souligne le Pr Irani « les progrès de l’imagerie et de la biologie permettent d’affiner les indications de la biopsie. On cible mieux les zones à biopsier et on prélève moins de carottes qu’il y a quelques années. La possibilité d’essaimer des cellules tumorales sur le trajet de la biopsie est réel mais extrêmement rare… De plus, l’absence d’alternative actuelle pour prouver le cancer de prostate n’incite pas à modifier les indications de la biopsie de prostate ».
D’après un entretien avec le Pr Jacques Irani, service d’urologie, CHU de Poitiers
(1) http://www.prnewswire.com/news-releases/diagnostic-center-for-disease-p…
(2) Moul JW, et al., J. Urol. 1989 Jul;142(1):86-8
(3) Vaghefi H, et al. Urology. 2005;66(4):881
(4) Moul JW, et al… Urology. 1998;51(1):158-60
(5) Ryan PG et al. Eur Urol. 1990;17(2):189-92
(6) Baech J, et al., Urol Int. 1990;45(6):370-71
(7) Greenstein A, et al. Urology. 1989;33(1):59-60
(8) Haddad FS et al. J Surg Oncol. 1987;35(3):184-91
(9) Emtage JB et al… Urology. 1986;27(6) 548-49
(10) Brausi M, et al. 1986;27(1):63-64
(11) Bastacky, S.S. et al. J Urol. 1991;145(5):1003-07
(12) Koppie TM, et al. J Urol. 2002 Nov;168(5):2120
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