DE NOTRE CORRESPONDANTE
"NOUS AVONS RÉALISÉ cette étude car les médecins ne pouvaient pas estimer de façon fiable le risque de maladie cardiaque chez les femmes traitées par radiothérapie pour le cancer du sein. Ils peuvent maintenant appréhender ce risque et savoir que dans la majorité des cas il sera très faible et rassurer leurs patientes. De plus, il est possible maintenant d’identifier les quelques femmes pour lesquelles la radiothérapie pose un risque indu, afin d’envisager des techniques alternatives", explique le Pr Sarah Darby (Université d’Oxford, Royaume-Uni) qui a dirigé cette étude publiée dans le New England Journal of Medicine.
Une moyenne de 4,9 Gray.
La radiothérapie occupe une place importante dans le traitement du cancer du sein, afin de réduire le risque de récidive locale et la mortalité.
Mais les études de suivi ont montré qu’elle est associée à un risque accru de maladie cardiaque ischémique. Toutefois, les techniques modernes d’irradiation ont permis de réduire la dose délivrée au cœur (de 1 à 2 Gy ou gray pour le cancer du sein droit ; et une dose variable autour allant jusqu’à 10 Gy pour le cancer du sein gauche) et le risque cardiaque associé aujourd’hui à la radiothérapie est incertain.
Pour calculer ce risque, Darby et coll. ont conduit une étude cas-témoin des événements coronaires majeurs (infarctus du myocarde, revascularisation coronaire, ou décès par cardiopathie ischémique) chez les femmes (n=2168) qui ont été traitées par radiothérapie pour cancer du sein entre 1958 et 2001 en Suède et au Danemark (selon les registres).
Pour chaque patiente, les chercheurs ont estimé les doses moyennes d’irradiation reçues par le cœur. Ces doses allaient de 0,03 Gy à 28 Gy, avec une dose moyenne de 4,9 Gy.
Une augmentation linéaire
Les résultats sont intéressants. Premièrement, le risque d’événements coronaires majeurs augmente linéairement avec la dose moyenne délivrée au cœur, de 7,4 % par gray (p‹0,001), quel que soit la dose minimale, et quelle que soit la présence ou non de facteurs de risque cardiaque.
Deuxièmement, ce risque augmente dans les 5 premières années après l’exposition et persiste pendant au moins 30 ans.
Troisièmement, ce risque s’applique au technologies d’irradiation utilisées après 1990.
Enfin, le risque absolu d’événement coronaire majeur lié à l’irradiation est beaucoup plus élevé pour les femmes qui présentent des facteurs de risque cardiaque préalables ou une maladie cardiaque ischémique. Ceci suggère que les facteurs de risque cardiaque devraient être évalués et traités agressivement au moment de la radiothérapie, voire avant, dès le diagnostic.
Il convient de noter que peu de femmes étaient âgées de moins de 40 ans au moment de la radiothérapie. De plus, les femmes étaient peu ou non traitées par anthracyclines, taxanes ou trastuzumab, médicaments connus pour avoir des conséquences cardiovasculaires.
Facteurs de risque asociés.
En général, ces résultats sont rassurants. Par exemple, chez une femme de 50 ans sans facteur de risque cardiaque préalable, une radiothérapie délivrant au cœur une dose de 3 Gy augmenterait son risque de décès par cardiopathie ischémique (avant l’âge de 80 ans) de 1,9 % à 2,4 % (soit une augmentation absolue de 0,5 points). Si la dose cardiaque reçue était de 10 Gy, son risque absolu de décès par cardiopathie ischémique augmenterait de 1,9 % à 3,4 % (1,5 points).
Toutefois la radiothérapie peut augmenter considérablement le risque coronarien chez les femmes ayant déjà des facteurs de risque cardiaque ou ayant eu un IM, et chez les femmes dont le cœur est très proche de la paroi thoracique.
"Nos résultats sont déjà utilisés dans les centres de cancer à travers le monde et nous avons entendu dire que cela fait une différence pour les patientes. Il est important de rappeler que pour la plupart des femmes traitées aujourd’hui, les bénéfices de la radiothérapie pour le cancer du sein surpassent largement les risques", souligne le Dr Carolyn Taylor (Université d’Oxford), une autre signataire de l’étude.
NEJM 14 mars 2013, Darby SC. et coll.
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