On retiendra l’essor assez incroyable de médicaments ciblés –tous n’étant pas très ciblés, en particulier les derniers approuvés, utilisables par voie orale. À l’opposé les anticorps monoclonaux ont une cible membranaire ou circulante unique. Ainsi on peut cibler la partie extracellulaire d’un récepteur transmembranaire, ou la partie intracellulaire, porteuse de l’activité kinase.
Citons par exemple le trastuzumab et le lapatinib, dont l’un est un ligant extra-membranaire du récepteur HER2, tandis que l’autre vise sa partie enzymatique intracellulaire. Les deux agents sont utilisés, à des stades différents pour le traitement de cancers du sein surexprimant HER2 Un grand nombre de médicaments ont ainsi été mis sur le marché, parfois à des prix dépassant les 100 000 euros par an. Il a fallu concevoir un dispositif qui permettrait de les mettre à disposition, sans que cela ne fasse s’effondrer la T2A, en particulier dans les hôpitaux ou les centres qui ont une très grosse activité de cancérologie : il s’agit de la liste en sus, sur laquelle sont inscrits puis rayés certains médicaments innovants, dans l’attente de leur évaluation finale. Personne n’en conteste le principe.
Mais qui en décide ? Actuellement, la commission de transparence de la HAS définit le Service médical rendu (SMR) et l’Amélioration du service médical rendu (ASMR). Il n’est pas rare qu’un nouveau médicament reçoive un SMR favorable, mais une ASMR de 4 ou 5, interdisant pratiquement son remboursement et l’inscription sur la liste en sus, donc leur prescription. La sortie de la liste en sus peut être prononcée quand le médicament est génériqué, à la demande de l’industriel par autosaisine de la commission qui gère la liste en sus, et ne comporte pas de médecin. Les agents ciblés par voie orale, avec des coûts de traitement qui peuvent être très élevés, n’ont pas ces limitations et ne pèsent pas sur la T2A. Il y a un risque d’inéquité. Sont notamment dans le viseur, le pemetrexed (Alimta, adénocarcinomes bronchiques métastatiques), la doxorubicine liposomale pégylée (Caelyx, cancer ovarien réfractaires ou résistants aux organoplatines), et des anti-EGFR tels que le cetuximab et panitumumab (seule option dans les cancers coliques métastatiques).
C’est fort légitimement que les praticiens, cancérologues, ainsi que les groupes Unicancer et la FHF ont réagi. Nous réclamons que lorsque des médicaments sont sur le point d’en être radiés, l’on apprécie l’impact que cela aura sur les prescriptions et les malades. En d’autres termes, face au SMR, prenons aussi en compte le « déficit médical » créé… De leur côté, il faudra que les industriels se refrènent sur les prix, parfois sans commune mesure avec le prix de revient, études comprises – on le voit au moment de la générification.
Propos recueillis par la Dr Charlotte Pommier
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