Lors de la première vague, les patients n’osaient plus ou ne pouvaient plus aller à l’hôpital pour leurs rendez-vous. Ils repoussaient le moment de consulter. Certains diagnostics ont donc été plus tardifs, entraînant des retards d’accès aux traitements et une perte de chance pour les patients. La surcharge hospitalière s’est très vite fait ressentir. Pour ouvrir des lits de réanimation, il a fallu déprogrammer des opérations et réquisitionner du personnel de chirurgie.
« Les patients âgés atteints de cancer étaient ainsi soumis à une double peine. Du fait de leur maladie, ils étaient particulièrement fragiles et à risque de développer des formes graves de Covid. De plus, s'est ajouté un risque de perte de chance face au cancer, faute de dépistage et de prise en charge », soulève le Dr Tristan Cudennec, gériatre au CHU Ambroise Paré (Boulogne-Billancourt).
Une indispensable concertation entre oncologue et gériatre
La Société francophone d’onco-gériatrie (SoFOG) a rapidement proposé des adaptations pour la prise en charge des patients âgés atteints de cancer, en insistant sur la nécessaire concertation entre l’oncologue et le gériatre pour les décisions difficiles (1). En cas de syndrome de détresse respiratoire aigu lié au SARS-CoV-2, la prise en charge en réanimation doit être discutée collégialement. « Les discussions collégiales sont ainsi devenues plus systématiques et perdurent », souligne le Dr Cudennec.
Il a aussi été précisé que les explorations en amont du diagnostic, comprenant l’évaluation gériatrique et les examens complémentaires, étaient à pondérer en fonction du pronostic évalué de la pathologie tumorale. Des recommandations ont également été émises pour protéger les patients atteints de cancer contre l’infection par le SARS-CoV-2 (2).
Chez les patients atteints de cancer sans Covid-19, les mesures permettant une prise en charge à domicile devaient être encouragées : télémédecine et appels téléphoniques à la place des visites physiques, remplacement des médicaments intraveineux par des formes orales… « Les téléconsultations ont été privilégiées. Elles sont surtout valables pour le suivi de patients ayant déjà consulté. Leur essor se poursuit encore aujourd’hui », reconnaît le Dr Cudennec.
Un risque plus élevé de Covid sévère
Par rapport à la population générale, les patients âgés atteints de cancer courent un risque plus élevé d’infection par le Covid-19 et de développer des formes respiratoires graves, nécessitant une admission en unité de soins intensifs. Cela a été confirmé par les données d’une grande cohorte française (GCO-002 CACOVID 19), qui a étudié les facteurs prédictifs de gravité et de mortalité du Covid-19 chez des patients cancéreux entre mars et juin 2020 (3). Les données de 1 289 patients (âge moyen 67 ans) ont été analysées. Parmi eux, 33 % avaient une forme sévère de Covid-19 et 29 % sont décédés. Les facteurs associés au risque de décès étaient ceux déjà relevés dans la population générale : le sexe masculin, les comorbidités et l’admission en soins intensifs. Chez près de 40 % des patients, le traitement anticancéreux systémique a été interrompu ou arrêté après le diagnostic de Covid-19.
Des recommandations pour la vaccination
La vaccination contre le SARS –CoV-2 est recommandée en l’absence de contre-indications définitives ou temporaires : épisode infectieux en cours, contamination par le Covid-19 inférieur à trois mois, allergie à un composant du vaccin, vaccination antigrippale de moins de trois semaines. D’après la SoFOG, Il est recommandé de vacciner au moins 10 jours avant la première cure de chimiothérapie. Si une chimiothérapie ou une thérapie ciblée est en cours, il faut éviter de réaliser le vaccin le jour de l’administration du traitement, sous peine de réduire l’effet du vaccin. Il faut plutôt le réaliser entre deux cures, en évitant la période d’aplasie. Pour protéger d’autant plus ces patients âgés atteints de cancer, il est recommandé de vacciner également leur entourage proche.
(1) www.sofog.org
(2) Mourrey L et al. Taking care of older patients with cancer in the context of Covid-19 pandemic. The Lancer Oncology vol 21 may 2020.
(3) Lièvre A et al. Risk factors for coronavirus disease 2019 severity and mortality among solid cancer patients and impact of the disease on anticancer treatment : a french nationwide cohorte study (GCO-002 CACOVID-19). European Journal of Cancer 2020;141:62-81.
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