Cancer : des Français moins bien dépistés mais mieux soignés que la moyenne européenne

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Publié le 14/05/2024

Dans la lutte contre le cancer, la France affiche une situation mitigée : à la traîne sur le dépistage, la prévention et la démographie médicale, le pays obtient pourtant des taux de survie supérieurs à la moyenne européenne, selon un rapport de l’Organisation européenne du cancer.

Crédit photo : BURGER/PHANIE

Tabagisme « excessif », difficultés à atteindre les objectifs de dépistage, moindre effectif d’oncologues… Malgré ses lacunes, la France affiche des taux de survie à 5 ans après un cancer supérieurs à la moyenne européenne dans les cancers du sein (87 % contre 83 %), du poumon (17 % contre 15 %), colorectal (64 % contre 60 %) et de la prostate (93 % contre 87 %). C’est l’un des paradoxes pointés par l’Organisation européenne du cancer.

Dans un rapport publié le 13 mai et présenté à l’Institut Curie, ce regroupement de professionnels de santé et de patients détaille une série d’indicateurs sur le cancer dans la région Europe de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il apparaît ainsi que la France connaît une incidence du cancer supérieure à la moyenne européenne (618,9/100 000 contre 571,5), mais une mortalité inférieure (226,6/100 000 contre 242,2).

Le tabac provoque 60 % de décès de plus en France qu’ailleurs en Europe

Dans le détail, la France apparaît en retard sur le recul du tabagisme avec encore 25,3 % de fumeurs, contre 18,8 % en moyenne en Europe. « Ce tabagisme excessif tue plus de 48 000 Français chaque année, soit jusqu’à 60 % de plus que dans d’autres pays européens », est-il souligné. La situation est plus nuancée sur l’alcool (10,5 litres par adulte et par an, contre 10 en Europe) et l’obésité (14,4 %, contre 16 %).

Le retard français est aussi marqué pour le dépistage du cancer du sein (46,9 % de la population cible, contre 54 %) et dans le cancer colorectal (34,6 %, contre 36 %, avec certains pays atteignant l’objectif de 80 %). Le pays s’en sort mieux sur le dépistage du cancer du col de l’utérus (58,8 %, contre 56 %). La couverture vaccinale contre le papillomavirus des filles de 9 à 14 ans plafonne pourtant à 42 %, alors que l’objectif est à 90 %.

Autre fait saillant, la France compte deux fois moins d’oncologues que la moyenne européenne : 1,52 oncologue pour 100 000 habitants contre 3,24 en moyenne en Europe. Les effectifs infirmiers sont également en retrait : 858 infirmières/100 000 habitants, contre 879. Aussi, 30 % de la population française vit dans un désert médical, « affectant particulièrement les zones rurales et les populations âgées », est-il relevé. Le pays est cependant bien doté en appareils de radiothérapie : 9,95 pour 1 million d’habitants, contre 7,38 en Europe.

Des inégalités toujours marquées

Cette situation contrastée se traduit par des inégalités en termes de survie. Dans le cancer colorectal par exemple, un écart de 6,4 points est observé entre les hommes issus des zones les plus défavorisées et ceux des zones plus favorisées. « Cette différence est de 5,5 points chez les femmes et atteint 15 points pour certains cancers », lit-on.

Concernant les initiatives nationales, si la France s’est dotée d’une stratégie décennale portée par l’Institut national du cancer (Inca), elle ne dispose toujours pas d’un registre national des cancers, pointe le rapport.

Dans l’optique de réduire les écarts entre pays et de poursuivre l’héritage de la Pr Véronique Trillet-Lenoir, oncologue et députée européenne, décédée en août 2023, l’Organisation européenne du cancer a élaboré un « Manifeste européen contre le cancer » avec des objectifs clairs.

Il s’agit notamment de s’attaquer à la consommation de tabac en fixant un âge minimum (21 ans) pour la vente de tabac (« tabac 21 ») pour une génération sans tabac d'ici à 2040 ; et en taxant les nouveaux produits à base de tabac et de nicotine. Le Manifeste appelle aussi à l’élaboration d’un plan d’action européen contre les pénuries de personnel de santé en oncologie. Autant de pistes sur la table en amont des élections européennes.


Source : lequotidiendumedecin.fr