Allergies médicamenteuses

Réactivation de virus quiescents dans le DRESS.

Publié le 17/12/2010
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RÉACTION ALLERGIQUE à un médicament, le DRESS (Drug Reaction with Eosinophilia and Systemic Symptoms), également appelé syndrome d’hypersensibilité, associe à la manifestation cutanée des atteintes systémiques, pulmonaires, parfois cardiaque, et peut être responsable d’une mortalité élevée. Les DRESS sont susceptibles de survenir avec la prise d’anti-épileptiques (un patient pour 8 000 dans le cas de la carbamazépine), d’antibiotiques, de certains anti-infectieux (Bactrim, Disulone), de l’allopurinol, de la minocycline ou d’antivitamine K. Du fait de l’existence d’une fièvre élevée, le DRESS peut parfois être confondu avec une maladie infectieuse. Étant donné le potentiel de gravité, le médicament doit impérativement être arrêté mais le syndrome peut persévérer quelques semaines après l’arrêt.

Il y a quelques années, les chercheurs de l’équipe de Philippe Musette (Rouen, Inserm 905) ont choisi de travailler sur les allergies médicamenteuses et ont suivi 40 patients qui présentaient un DRESS, décelant ainsi des particularités associées au DRESS. Ils ont mis en évidence sur les lymphocytes T CD8 cytotoxiques des malades, des récepteurs présentant des homologies avec des récepteurs de lymphocytes T reconnaissant le virus EBV. « Nous avons recherché chez les patients une réactivation virale de virus quiescents, et trouvé que les médicaments en cause entraînent une réactivation de virus de la famille herpès : l’EBV et aussi les HHV6 et HHV7. » La multiplication virale est perceptible chez 76 % des malades du groupe de 40 personnes et les indices lymphocytaires montrent que la majeure partie de la réponse immunitaire des patients est dirigée contre les particules virales. « L’organisme ne réagit donc pas contre le médicament, jusqu’alors jugé responsable du déclenchement des symptômes d’allergie, mais il lutte contre l’invasion et les réactions virales induites par le médicament. » Les CD8 sont également présents dans les organes atteints (peau, poumon…). Ils expriment des molécules de « homing » qui leur permettent d’aller dans les organes et des cytokines inflammatoires dirigées contre les virus (TNF alpha, INF gamma). Présents chez tout le monde, les virus quiescents sont activés seulement chez certains individus qui prennent des médicaments. Il existe donc une susceptibilité particulière à présenter un DRESS ; des pistes génétiques sont en cours d’investigation par ces mêmes chercheurs.

Science Translational Medicine, 25 août 2010, vol 2, n°46, 46ra62

 Dr BRIGITTE VALLOIS

Source : Le Quotidien du Médecin: 8879