« L’ÉTUDE Tabac-Territoires-Travail a pour objectif de motiver les entreprises à prendre en compte le tabagisme. Elle a été réalisée dans une optique médicale et, en aucun cas, pour stigmatiser les fumeurs au travail. À présent, il serait pertinent de chiffrer les coûts induits par les faits décrits dans cette étude ainsi que le bénéfice de l’arrêt du tabac », affirme haut et fort, le Pr Dautzenberg.
Habitudes sur le lieu du travail, rapport avec la hiérarchie et prévalence des arrêts de travail, tels sont les thèmes développés par Tabac-Territoires-Travail. D’après cette étude portant sur l’ensemble de la population active*, il existe une différence significative entre homme et femme en ce qui concerne la prévalence des fumeurs. Parmi les femmes actives de 18 à 65 ans, 21,5 % sont fumeuses contre 29,3 % des hommes actifs de la même tranche d’âge. Le pic de tabagisme au travail se situe à l’âge de 25 ans.
Autre différence importante : celle concernant la prévalence des fumeurs au travail selon la catégorie socio-professionnelle : 21,4 % des cadres et professions intellectuelles interrogés déclarent fumer ; les ouvriers sont presque deux fois plus nombreux que les agriculteurs à fumer (32,8 % contre16,6 %).
« L’inégalité sociale devant le tabagisme n’est pas intrinsèque mais liée à la situation actuelle de la France, souligne le pneumologue. Il y a trente ans, les hommes cadres étaient plus nombreux à fumer. Aujourd’hui, ceux-ci sont les premiers à vouloir s’arrêter de fumer. Le tabagisme chez les hommes ouvriers est devenu bien plus important. »
Par ailleurs, 6 % des fumeurs déclarent consommer plus de 21 cigarettes par jour, 36 % entre 11 et 20 cigarettes par jour, 31 % entre 6 et 10 et 27 % moins de 5. Et 1 personne sur 2 fumerait pendant ses heures de travail. Mais seulement près d’un actif sur 3 déclare l’existence d’un espace fumeur au sein de son entreprise.
Des malades chroniques.
Plus les fumeurs consomment de cigarettes par jour, plus, logiquement, ils font des pauses durant leur temps de travail. En moyenne, une pause de 5 à 10 minutes correspondrait à 2,5 cigarettes fumées par jour. Les fumeurs consommant 20 cigarettes au quotidien s’octroieraient ainsi 8 pauses par jour, soit plus d’une heure de temps de travail perdue.
La hiérarchie joue également un rôle en matière de tabagisme au travail : la prévalence de fumeurs durant les heures de travail est bien plus importante lorsque le supérieur hiérarchique consomme des cigarettes. En outre, les fumeurs sont plus nombreux que les ex-fumeurs » et non-fumeurs à déclarer avoir eu un accident de travail. Ainsi qu’un arrêt de travail au cours des 6 derniers mois.
Enfin, seule une personne sur deux affirme avoir été interrogée sur le tabagisme par son médecin du travail lors de sa dernière visite médicale. « Ce qui est très décevant. Car le médecin du travail doit jouer un rôle important en matière de prévention et de sevrage tabagique. Les fumeurs dépendants – ceux qui ne peuvent pas s’empêcher de fumer au travail – sont des malades chroniques. Ils doivent être pris en charge et considérés comme de vrais patients. Des efforts importants ont, tout de même été réalisés dans la lutte contre le tabagisme. Depuis l’entrée en application de la loi Évin, les rapports entre fumeurs et non-fumeurs ont beaucoup évolué : ils sont plus respectueux et solidaires. Et les progrès en matière de lutte contre le tabagisme passif sont remarquables », a conclu le Pr Dautzenberg.
* L’institut CSA santé a constitué en juin 2009 un échantillon représentatif de la population française active (28 millions) de 18 à 65 ans, selon la méthode des quotas : grande région de résidence, taille de la commune, sexe, âge, CSP, taille de l’entreprise. Au total 1 950 personnes ont été interrogées.
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