Le secteur du grand âge était déjà perplexe il y a sept mois, lors du report sine die de l'examen de la proposition de loi « Bien vieillir » portée par la présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée Aurore Bergé. Le scepticisme est toujours de mise ce lundi 20 novembre, alors que les députés reprennent la lecture du texte. Devenue dans l'intervalle ministre des Solidarités et de la famille, Aurore Bergé a présenté sa stratégie interministérielle le 17 novembre, en donnant d'emblée des gages aux professionnels du monde médico-social.
La ministre a promis une loi de programmation pluriannuelle sur le grand âge réclamée de longue date par les acteurs de terrain. Cette loi grand âge, promise par le président de la République Emmanuel Macron au début de son premier quinquennat, a été maintes fois reportée avant d'être finalement abandonnée. Aurore Bergé, qui a dit vendredi « entendre » cette demande, s'est engagée à la faire aboutir. En attendant un texte de plus grande ampleur, elle a espéré que les travaux parlementaires viendront « encore enrichir » la proposition de loi afin qu'elle soit adoptée « d'ici la fin de l’année ».
Autre annonce de la ministre : le lancement de travaux sur la création d'un protocole d'accord entre l'État et les grandes fédérations hospitalières publiques et privés concernés. L'objectif de cette concertation reste de parvenir au recrutement de 50 000 professionnels en Ehpad à l'horizon 2030, recrutement facilité par une visibilité nouvelle sur les financements accordée aux établissements. Les missions du médecin coordonnateur seront étendues pour lui permettre de réaliser des prescriptions et de devenir le médecin traitant des résidents.
Par ailleurs, la fusion des sections soins et dépendances (deux des trois pans du financement complexe des Ehpad) sera expérimentée dans les départements volontaires pour créer un nouveau forfait global et ainsi simplifier la gestion financière de ces établissements.
Afin de mieux coordonner les trois secteurs très constellés des métiers du social, du médico-social et du soin, la ministre a confirmé la création d'une délégation interministérielle dédiée, sorte de guichet unique clairement identifié au sein de l'administration. Une vingtaine de ministères seront associés au « bien vieillir ».
Le volet de la formation initiale comme continue n'est pas omis : sera créé un nouveau métier d'accompagnement autonomie. D'autres aspects liés à l'interministériel sont mis en avant comme l'accessibilité numérique, les mobilités et transports, la transition écologique, la recherche (via les nouveaux IHU) et le logement. Un comité interministériel sera chargé du suivi pendant toute la durée du mandat.
Manque d'ambition
La Fédération hospitalière de France (FHF) s'est félicitée de la création d'un protocole pluriannuel commun entre le gouvernement et les fédérations d'employeurs « indispensables pour adapter l'appareil de formation, planifier l'accompagnement des professionnels en poste vers de nouvelles qualifications et donner la possibilité d'anticiper des nouveaux recrutements ». La Fédération restera toutefois vigilante sur l'application des mesures à court terme comme l'abondement des fonds d'urgence et de soutien exceptionnel aux établissements médico-sociaux de 200 millions d'euros.
Mais critiquée par les oppositions et jusque dans le camp présidentiel pour son manque d'ambition, la stratégie globale autant que la proposition de loi qui va avec ne fait pas l'unanimité.
Telle que présenté par le gouvernement, le texte pour « bâtir la société du bien vieillir » comprend des mesures de lutte contre l'isolement des personnes âgées, un dispositif pour signaler les cas de maltraitance et un article relatif au droit de visite dans les Ehpad. Il vise aussi à « faciliter le travail au quotidien » des aides à domicile, via une carte professionnelle. Selon la cheffe de file des députés LFI Mathilde Panot, il s'agit d'« une coquille vide qui n'est pas du tout à la hauteur des enjeux ». L'élu socialiste Jérôme Guedj, dont le groupe a déposé une proposition de loi alternative beaucoup plus volumineuse, n'y voit rien d'autre qu'une« petite loi ».
En 2030, un Français sur trois aura plus de 60 ans. Et pour la première fois, les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans.
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