Le Rassemblement national (RN) a gagné les élections européennes, il ambitionne maintenant de gagner les législatives et de conquérir le pouvoir. Une campagne éclair, qui a déjà commencé, en attendant le premier tour, qui aura lieu le 30 juin prochain.
Pour l’instant, une seule mesure précise – qualifiée « d’urgence » – concernant la santé a été dévoilée par l’aspirant Premier ministre Jordan Bardella : une exonération d’impôt sur le revenu pour tous les médecins en cumul emploi-retraite. « Cela enverra dès l’été un signal pour renforcer l’offre de santé sur tout le territoire », a-t-il déclaré au Parisien.
Peu fournie, la profession de foi du RN – en huit points – adressée à tous les candidats investis, fait mention de « réduire les déserts médicaux, soutenir l'hôpital public et sécuriser l'approvisionnement des médicaments ». Pour le reste, le RN devrait s’appuyer largement sur son programme pour la présidentielle 2022 afin de nourrir son projet.
Haro sur la bureaucratie à l’hôpital
L’artisan de ce programme est le conseiller santé de Marine Le Pen, le Dr Patrick Barriot, médecin anesthésiste et ancien médecin colonel, par ailleurs auteur de plusieurs ouvrages sur la Serbie. Lors de la dernière campagne, il préconisait le relèvement du numerus clausus « pour éviter le recours massif aux médecins étrangers ». La lutte contre les déserts médicaux passe, elle, par « un stage d’internat dans les zones concernées, en permettant aux médecins retraités d’y exercer avec des déductions de charges », tout en y développant les maisons de santé.
L’hôpital n’était pas oublié avec une volonté affichée d’y augmenter les salaires et d’y « limiter la bureaucratie », en plafonnant à 10 % la part des postes administratifs. La fin de la tarification à l’activité (T2A) était aussi au programme avec la volonté de revenir « à une forme de budget global ». Côté gouvernance, Marine Le Pen avait affirmé vouloir supprimer les agences régionales de santé (ARS) pour confier la tutelle des hôpitaux aux préfets de région.
20 milliards pour la santé en cinq ans ?
Au Quotidien, Marine Le Pen avait expliqué pendant cette dernière campagne présidentielle, vouloir injecter quatre milliards par an pour la santé, soit 20 milliards durant tout le quinquennat – 10 en revalorisations salariales et embauches et 10 en investissements avec un plan IRM-scanners – qu’elle financerait notamment grâce à 15 milliards de recettes liées à la fraude. Mais rien ne dit que cet engagement annuel sera repris.
En médecine de ville, Marine Le Pen avait proposé de « moduler » la rémunération de la consultation selon le lieu d’installation. Le volet prévention était abordé par le prisme des « visites médicales scolaires qui redeviendront systématiques ».
Un des marqueurs principaux du RN – très souvent évoqué par ses cadres – concerne la suppression de l’aide médicale d’État (AME), qui permet aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d’une prise en charge gratuite d’un panier de soins défini. Marine Le Pen avait affiché dans nos colonnes sa volonté de remplacer l’AME par « une aide d’urgence ou en cas de risque d’épidémies », tout en la conservant « pour les mineurs ».
Quelques députés actifs en santé
Au-delà, les propositions en santé du RN devraient également s’appuyer sur le travail de quelques parlementaires spécialisés dans ces questions. Depuis 2022, 88 députés RN siègent à l’Assemblée nationale. Leur cheffe de file pour les questions de santé est de longue date la généraliste Joëlle Melin, laquelle siégeait à la commission des Affaires sociales – et qui est candidate à sa réélection. Ses votes rendent compte de certains positionnements du parti : abstention sur l’inscription de l’IVG dans la Constitution, favorable à la proposition de loi pour réintégrer les soignants non vaccinés… Elle est également l’autrice d’un texte pour « protéger les mineurs contre certaines pratiques médicales et chirurgicales en matière de transition de genre ».
Dans cette commission figurent aussi l’omnipraticien retraité Thierry Frappé (qui a voté contre une régulation à l’installation) et la médiatique porte-parole du RN Laure Lavalette. Cette dernière a rédigé une proposition de résolution pour « reconnaître et permettre la prise en charge intégrale par l’Assurance-maladie du tatouage thérapeutique 3D suite à un cancer du sein ». Un autre texte vise à « faciliter la création de structures d’accueil temporaires adaptées aux personnes malades et en perte d’autonomie ». D’autres députés RN sont intervenus dans le champ médical, comme Christine Loir, auxiliaire de vie de formation, qui avait porté une PPL pour « garantir les remboursements des produits et prestations médicales aux personnes en situation de handicap ».
Parmi les candidats RN à la députation cette année figurent le gériatre Louis Albrand (Hautes-Alpes) ou le neurologue Jean-Philippe Chartier (Aveyron). Ce dernier a fait du bruit dans la presse locale, en s’imaginant déjà à la tête de Ségur. « Vous allez me prendre pour un mégalomane, mais je me vois bien ministre de la Santé », avant de préciser, « si l’on parvient au pouvoir bien entendu ». Une nuance de taille.
54 % des médecins femmes ont été victimes de violences sexistes et sexuelles, selon une enquête de l’Ordre
Installation : quand un cabinet éphémère séduit les jeunes praticiens
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier