DSS. Quel a été le taux de participation des élections professionnelles chez les directeurs le 8 décembre dernier ?
Maxime Morin : Nous sommes un peu déçus. Ce taux de 70 % est encore fort, mais en recul de 10 points par rapport au dernier scrutin de 2018 (presque 80 %). Cette forte participation nous avait été profitable. Nous payons le fait que, comme partout dans la fonction publique, les représentants des personnels, en l’occurrence de direction, ont vu leurs prérogatives diminuer. Par exemple, l'État a fait le choix de retirer des thématiques importantes de suivi des carrières dans les commissions nationales paritaires. Résultat, nous disposons de moins d'informations sur et pour nos adhérents. Autre motif d’abstention, nos collègues vivent une certaine lassitude suite à 3 ans de crise sanitaire. Ils en ont assez de cette situation où ils ne sont pas toujours bien traités par les pouvoirs publics et insuffisamment soutenus.
DSS. Mais votre syndicat reste leader…
Maxime Morin. Certes, le Syncass CFDT arrive en tête dans les trois corps de direction. Avec 50,4 % (vs 56 % en 2018), nous conservons aussi la majorité absolue au sein du comité consultatif national qui permet de mesurer la représentativité. Rappelons-le, la campagne s'est déroulée sur une thématique assez clivante et de manière très frontale, l'unicité statutaire des corps des DH et des D3S, défendue par trois des syndicats en lice (Syncass-CFDT, CH-FO, UFMICT-CGT). Le cumul de nos poids relatifs est de deux tiers contre un tiers seulement pour le SMPS opposé à cette réforme. Le résultat est donc clair et net.
DSS. Depuis combien de temps réclamez-vous ce changement ?
Maxime Morin. Depuis plusieurs années, deux mandats en fait. Avec CGT et FO, nous avions alors sollicité un arbitrage auprès des ministères concernés, que nous n'avons pas obtenu. Toutefois, l'État s’est depuis lancé dans une politique pour ses propres corps de hauts fonctionnaires qui va dans ce sens d'une réduction du nombre de corps.
DSS. Quel est le but de l'exécutif ?
Lionel Pailhé. Il existe déjà la possibilité pour les collègues D3S d'être détachés dans le corps de directeur d'hôpital pour y exercer des fonctions voisines. En effet, les deux corps sont jugés comparables. Toutefois, il existe une différence importante en ce qui concerne les grilles de rémunération et le régime indemnitaire. Conséquence, cela pénalise ces collègues D3S moins bien payés alors qu'ils sont exposés à des difficultés de fonctionnement similaires voire plus importantes. Quand des directeurs d'hôpitaux choisissent d'exercer sur des postes de D3S, vu la perte de rémunération, cela devient une forme de sacerdoce. Au fond, de notre point de vue, la césure artificielle entre le sanitaire (l'hôpital) et le médico-social (maisons de retraite, handicap, enfance) n'a plus lieu d'être. Ce dispositif est lié seulement à une construction successive de lois, mais ne correspond pas à la conception d'un système de santé intégré et global.
Maxime Morin. Sur ce sujet, le Conseil d'État s’est constamment prononcé pour dire que les entrées et sorties dans des corps comparables pouvaient se faire sans aucun frein. Ce mouvement est par ailleurs entamé dans la fonction publique d'État visant à réduire le nombre de corps pour fluidifier les mouvements entre les administrations. Par ailleurs, nous sommes confrontés à une autre problématique qui est celle de l'attractivité. Cela se lit dans le nombre de candidats qui a baissé aux concours de DH et de D3S alors que le nombre de places a augmenté. Quant au concours de directeurs des soins, cela fait déjà deux ans qu'il y a moins de reçus que de places ouvertes. Ce problème démographique ne pourra être corrigé que si l'on fait évoluer les statuts. Facteur aggravant, beaucoup de directeurs partent à la retraite. Le taux de participation assez élevé doit être considéré à cette aune, car le taux d'adhésion reste important pour des corps peu nombreux en volume. Bref, nous restons attractifs en tant que syndicats.
DSS. Quid des élections des directeurs de soins, profession mal connue ?
Maxime Morin. Ce sont des résultats très contrastés. Nos collègues directeurs des soins sont légitimement déçus par une réforme statutaire ayant eu lieu début 2022 qui n'a pas apporté de gain indiciaire pour tous, notamment pour les plus hauts emplois de ce corps, alors qu'ils ont les missions les plus lourdes. Notre syndicat souhaite que ce statut soit revu. La CFDT, à laquelle nous appartenons, fait partie des signataires du Ségur. Nous avons beaucoup milité et avons été soutenus pour qu'elle pose comme revendication l'intégration des directeurs des soins dans les discussions statutaires, et nous continuons de le faire. Notre objectif notamment était de recréer de l'écart avec les grilles les plus hautes de cadres supérieurs de santé. Mais le résultat n'a pas été assez manifeste. D'où un découragement des candidats à passer le concours et de nombreux postes maintenus vacants dans les établissements ou occupés par des faisant-fonction.
Lionel Pailhé. Le corps des directeurs de soins est celui où la baisse de la participation a été la plus forte. C'est celui qui est le plus fragilisé avec un nombre conséquent de collègues relativement âgés, passé de 800 membres à moins de 670 en dix ans. Ce qui traduit un certain désarroi et de la souffrance dans la profession. En tant que syndicat, il nous faudra recréer de la cohésion. Mais l'État devra aussi prendre ses responsabilités. La place majeure des directeurs des soins dans la gestion de la crise sanitaire a été soulignée, mais l’État n’a pas reconnu la profession à hauteur de ses responsabilités.
DSS. Comptez-vous reprendre langue avec vos ministères pour revoir cette grille ?
Maxime Morin. Nous sommes en effet en mesure de faire valoir notre résultat aux élections. En 2022, l'État a réalisé une réforme importante dans la haute fonction publique d'État. Conséquence logique, une discussion est attendue pour les deux autres fonctions publiques, la territoriale et l'hospitalière.
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