Théâtre
Un plateau nu, enveloppé au fond d’un mur ouvert de fenêtres et de portes qui évoque un théâtre élisabéthain. De beaux costumes, des lumières harmonieuses, une économie d’éléments, des mouvements vifs, des scènes qui s’enchaînent très rapidement en fluides fondus enchaînés, un usage efficace de la musique et du son, tout dans ce spectacle haletant est fait pour que le chef-d’œuvre de Shakespeare nous parvienne dans sa grandeur, sa force, son émotion.
C’est Serge Merlin, qui joua pour la première fois la pièce il y a près de trente ans, qui a demandé à Christian Schiaretti, directeur du Théâtre national populaire de Villeurbanne, de le mettre en scène. Il a choisi la traduction superbe d’Yves Bonnefoy et la poésie tragique, dans une langue sublime, nous parvient magnifiquement avec ses subtilités, son âpreté et son humour, car, comme toujours, la cruauté s’apaise parfois en scènes cocasses.
La réussite est totale et l’on est admiratif devant le parcours de Serge Merlin, qui, frêle et fragile apparemment, conserve à 81 ans, une voix puissante et prenante et une énergie pleine de la joie de jouer. Ce grand interprète n’est pas seul : 15 comédiens dans des partitions importantes et une dizaine de figurants nourrissent l’accomplissement de cette production qui fera date.
Il faudrait commenter le parcours de chacun, car chacun compte et donne aux personnages une présence essentielle. Schiaretti fait de la célèbre scène au cours de laquelle le vieux roi demande à chacune de ses trois filles « comment » elle l’aime, une cérémonie très politique. Clara Simpson, l’altière Goneril, Magali Bonal, la féroce Régane, Pauline Bayle, la jeune Cordelia, tiennent leur parcours avec autorité et intelligence. Le mari de la première, le duc d’Albany, est incarné par Philippe Sire, celui de la deuxième, le duc de Cornouailles, par Julien Tiphaine. L’intendant des basses œuvres de Goneril, Oswald, est interprété par Olivier Borle. Le fou a l’accent de la lande : Andrew Bennett lui offre une amusante personnalité. Gloucester possède la grâce et la douceur de Philippe Duclos. Son fils, Edgar, est le touchant Christophe Maltot. Marc Zinga, l’extraordinaire Lumumba de la production précédente de Schiaretti, « Une saison au Congo », d’Aimé Césaire, incarne le fils bâtard, Edmond, et Paterne Boungou est Curan. Vincent Winterhalter est un remarquable comte de Kent, très fin et subtil. Le roi de France est joué par Clément Carabédian, le duc de Bourgogne par Mathieu Petit. Quant à Philippe Dusigne, il passe d’un rôle à un autre avec virtuosité. Une troupe, une réunion de grands talents. Ils sont la sève de la représentation.
Christian Schiaretti ne craint pas le sang, la violence, le bruit, la fureur, la folie. C’est très beau, très accompli. Les quatre heures (avec entracte rapide) passent à toute allure. Shakespeare est grand. Schiaretti aussi et Merlin et la troupe nous permettent de comprendre et d’être émus.
TNP-Villeurbanne, jusqu’au 9 février (tél. 04.78.03.30.00, www.tnp-villeurbanne.com). Puis Nancy (la Manufacture) les 28 et 29 mars, Paris (Théâtre de la Ville) du 12 au 28 mai et Dunkerque (Bateau-Feu) du 4 au 6 juin.
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