Un destin en trois temps

Théâtre

Elle fut célèbre car elle s’engagea de toute son énergie dans le combat pour la reconnaissance des droits des prostituées. Un grand caractère, pas destiné à exercer ce métier ; mais à un moment de sa vie, il lui fallut élever seule ses 4 enfants, alors Grisélidis Réal (1929-2005) se lança dans ce commerce pas franchement joyeux.

Françoise Courvoisier vient de Suisse, comme Grisélidis. Elle signe l’adaptation, la mise en scène et interprète la prostituée en pleine activité, à l’âge de 50 ans. Élodie Bordas est la jeune femme de 35 ans. Peintre, elle a été jetée en prison en Allemagne pour avoir vendu du haschich. Judith Magre est celle qui, au soir de sa vie, et alors qu’elle a écrit quelques livres, se bat contre un cancer dont elle finira par mourir.

Les lumières d’André Diot nous font passer d’un temps à l’autre, d’une comédienne à l’autre. C’est Judith Magre qui occupe la place centrale et ouvre le jeu. Elle est savoureuse. On devine l’autorité du personnage et, avec son timbre si personnel, elle donne du poids aux remarques de Grisélidis. Élodie Bordas est touchante et l’on ressent la solitude de l’enfermement. Longs cheveux noirs, toute de cuir vêtue, la Grisélidis de Françoise Courvoisier est très ressemblante. Autoritaire et drôle, pragmatique, comme Grisélidis le fut dans l’éclat de son âge. Elle tenait des carnets dans lesquels elle notait les désirs de ses clients. Évidemment ces passages sont d’une crudité qui peut gêner et les rires fusent, comme autant de défenses.

Une évocation sensible, conduite par celle qui fut la première, dès 1993, à porter à la scène ces écrits et fut son amie.

Manufacture des Abbesses, à 21 heures du jeudi au samedi, à 17 heures dimanche. Durée : 1 h 30. Jusqu’au 19 octobre. Tél. 01.42.33.42.03, www.manufacturedesabbesses.com.