LIVRES - Jardin, Mitterrand, Chancel, Labro

Retours sur le passé

Publié le 25/11/2013
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Un appel au charlisme

Il y a vingt-cinq ans, Alexandre Jardin recevait le prix Femina avec son deuxième livre, « le Zèbre », l’histoire d’un notaire qui tentait de reconquérir sa femme en usant de stratagèmes rocambolesques. Une trentaine de livres plus tard, son humeur est de nouveau à la joie et à la provocation. « Mes trois Zèbres » (1) est un hommage aux trois hommes dont la manière d’être a le plus influencé sa propre façon de vivre et, à travers eux, un livre sur la France : Sacha Guitry, qui joue avec le réel, Charles (de Gaulle), qui le défie, et Casanova, qui en jouit, incarnent pour lui trois attitudes hautement françaises, à savoir « prendre les choses graves à la légère, résister avec superbe, empocher son plaisir insouciamment ».

Loin d’une biographie, « Mes trois Zèbres » est un livre militant contre la sinistrose ambiante et pour l’insouciance, la liberté, l’anticonformisme et l’action individuelle. C’est évidemment le livre d’un écrivain de talent, dont on goûte les mots et les tournures, mais c’est aussi un livre qui frôle le politique, un appel à le rejoindre dans le « charlisme », ce mouvement qui, hors des partis actuels, rassemble (via la Toile essentiellement) de plus en plus de personnes qui pensent hors cadre et qui se prennent eux-mêmes comme point d’appui pour agir autrement. Un ouvrage hautement réjouissant.

Un ministère déculotté

Tout autant réjouissant est « la Récréation » (2), un pavé de plus de 700 pages constituées des notes prises au jour le jour par Frédéric Mitterrand, durant son ministère à la Culture dans le gouvernement Sarkozy, de juin 2009 à mai 2012. C’est gros, mais on ne s’ennuie pas, loin de là. Avec lui, on déambule dans les coulisses du pouvoir, on entend les ragots de couloir et l’on découvre des personnalités sous un jour bien différent. Car, même en jouant dans la cour des grands – qu’il assimile à une « cage aux lions » –, Frédéric Mitterrand est resté un écrivain lucide, habile à brosser des portraits et à décocher des traits. Sans s’épargner lui-même. Il reconnaît avoir pris un certain plaisir à observer la férocité des fauves et à esquiver – pas toujours – leurs coups de griffes. En a-t-il donné lui-même ? Les carnets intimes d’un homme – enfin – libre.

Une jeunesse indochinoise

Grand homme de radio et de télévision – « Radioscopie » pendant vingt-deux ans, « le Grand Échiquier » pendant quinze ans –, Jacques Chancel, 85 ans, s’est exprimé aussi par l’écrit, plus souvent à travers des essais que par le biais du roman. « La nuit attendra » (3) se situe entre ces deux genres, qui dévoile ses souvenirs d’Indochine.

Il n’avait pas 20 ans lorsque, après l’École des transmissions, à Montargis, il s’embarque pour l’aventure. À Saïgon, il est affecté à Radio-France Asie, comme animateur dans un programme de divertissement d’abord, puis comme correspondant de guerre. Jusqu’en 1958, il va parcourir tout le Sud-Est asiatique, et terminer ses études de droit entre Saïgon et Pékin. Un récit littéraire nostalgique et quelque peu suranné, qui ressuscite le Saïgon des années 1950.

La mort en direct

Philippe Labro est notre grand romancier américain. Il est aussi le journaliste français qui, ayant eu la chance d’être le premier sur place lorsque le président John Fitzgerald Kennedy a été assassiné, a fait la une de « France-Soir » alors qu’il n’avait que 26 ans. Il donne pour la première fois sa version authentique et intime de l’événement. Publié pour le 50anniversaire du drame, « On a tiré sur le président » (4) n’est pas une énième revue encyclopédique de toute l’affaire mais le regard et les souvenirs de quelqu’un qui y était. Il a vu Oswald, il a rencontré Jack Ruby, la veille du jour où il tua Oswald, il a senti et ressenti la confusion, les flics, la presse, le Texas et ce qu’il appelle les deux M : le mystère – des hypothèses de responsabilité, il n’en retient qu’une – et le mythe – il décrit « son Kennedy », ses pénombres et ses flamboyances.

(1) Grasset, 334 p., 20 euros.

(2) Robert Laffont, 721 p., 24 euros.

(3) Flammarion,352 p., 19,90 euros.

(4) Gallimard, 256 p., un cahier de photos, 20 euros.

MARTINE FRENEUIL

Source : Le Quotidien du Médecin: 9283