Peut-on résumer Rudolf Serkin (1903-1991), et comment ? Hélas il le faut bien, la place manquant ici pour faire l‘apologie complète d’une vie au service de la musique. Alors son itinéraire : né dans une famille pauvre à Eger, en Bohème ; éduqué musicalement à Vienne ; intégré à Bâle à la famille Busch, qui était ce que l’Europe centrale comptait de mieux pour la musique de chambre ; exilé en Amérique, où il fonda une université de musique, à Marlboro, dans le Vermont, et fut professeur au Curtis Institute of Music, à Philadelphie, avant de le diriger. Traits principaux : effacement, intransigeance, fidélité aux textes, rigueur.
Une seule œuvre pour aborder le musicien ? Dans un répertoire relativement restreint (Bach, Beethoven, Mozart, Schubert, Brahms, Reger), il faut le découvrir dans les « Concertos Brandebourgeois » de Bach, et particulièrement dans la cadence du cinquième, si l’on veut savoir ce que fulgurance veut dire. « Je suis musicien plutôt que pianiste, le piano est seulement mon instrument » se plaisait-il à affirmer.
On ne s’étonnera pas de trouver dans cette moisson quelques doublons. Serkin remettait sans cesse sur le métier les mêmes œuvres, qu’il approfondissait. Les concertos et certaines sonates de Beethoven avaient sa faveur, comme le « Deuxième Concerto » de Brahms ou celui de Schumann.
À côté de cela, de vraies originalités. Personne d’autre que Serkin ne défendait, au disque du moins, l’Allemand Max Reger, dont on trouve dans cette compilation le « Concerto pour piano » dirigé par Eugene Ormandy, les « Variations et Fugue sur un thème de Bach » et une « Sonate pour violon et piano ». Et la « Burlesque » de Richard Strauss, les rares deux concertos de Mendelssohn, le « Concerto pour la main gauche » de Prokofiev, celui de Bartók. Et les bijoux que sont les deux Lieder avec instruments obligés de Schubert, que chante Bennita Valente : « Auf dem Strom » avec Myron Bloom au cor, « Der Hirt auf dem Felsen » avec Harold Wright à la clarinette. Ajoutons les « Liebeslieder-Wälzer » de Brahms avec un quatuor vocal exceptionnel de cohérence, enregistrées comme les Schubert au Festival de Marlboro en 1960, et « 24 Préludes », les seules pièces de Chopin qu’il a enregistrées en studio, en 1976.
Le corps du coffret est donc consacré à son répertoire de prédilection, les sonates de Beethoven (17 sur les 32), dont certaines ont été récupérées post-mortem car le musicien en avait récusé la parution par scrupule, les concertos, sous la baguette de grands tels qu'Ormandy, Szell, Bernstein, Toscanini, Schneider, Walter… De Brahms, peu de pièces pour piano, mais les deux concertos, avec Szell et Ormandy, et de la musique de chambre. De Mozart, beaucoup de concertos, avec Szell et Schneider, et même un duo avec son fils Peter Serkin. Et Bach, bien sûr, dans lequel il est incomparable. Un petit livre récapitule très clairement l’ensemble et contient une biographie succincte mais parfaite de Jürgen Kesting.
Il ne manque pas grand-chose à cette somme de plus de 63 heures de musique. Rien n’est inédit, mais 13 albums apparaissent pour la première fois sur CD, dont des 78 tours gravés pour EMI dans les années 1930 ou quelques gravures tardives pour Deutsche Grammophon, notamment des concertos de Mozart avec Abbado. Qui possède cela, plus les concertos de Beethoven enregistrés à Boston pour Telarc avec Ozawa, aura l’intégralité de quarante ans de travail d’un immense génie à son piano.
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