Mille et une voix

Chez les chanteurs de jazz, Nat King Cole a toujours suscité une fascination particulière. Ainsi Gregory Porter, qui voue une admiration passionnelle au crooner. Sa mère lui avait dit un jour qu'il chantait comme ce dernier et, en 2004, il avait décidé d'écrire une comédie musicale dédiée à son père vocal spirituel, intitulée « Nat King Cole & Me ».

Il était donc tout naturel que Gregory Porter rende un vibrant hommage à son mentor. C'est chose faite avec un CD (Blue Note/Universal) qui reprend l'intitulé de ce spectacle. Il est entouré d'un trio remarquable, Christian Sands (l'actuel pianiste de Christian McBride), Reuben Rogers (contrebasse) et Ulysses Owen (batterie), du London Studio Orchestra, et d'un invité de marque, le trompettiste Terence Blanchard (sur deux titres). Porter se réapproprie avec brio, élégance, et de cette voix si charmante et caressante, les succès et standards du pianiste/compositeur. Un hommage très classe.

Mariages musicaux

Manu Le Prince a deux amours : le Brésil et le jazz. Des amours qui ont ponctué sa longue carrière, marquée récemment par un hommage à Johnny Alf, pionnier de la bossa-nova, et au parolier/compositeur mélodiste de Broadway, Cole Porter. Avec « In A Latin Mood » (Plaza Mayor Company Ltd/Sergent Major), elle réalise avec brio et réussite vocale plusieurs mariages.

Pour l'écriture de compositions originales, qu'elle a mises en parole en anglais, la chanteuse a fait appel à certains des meilleurs éléments de la scène jazz actuelle, les pianistes Baptiste Trotignon,  Gregory Privat, Giovanni Mirabassi, son fils Julian Le Prince Caetano, l'accordéoniste Marc Berthoumieux. Avec en plus deux très belles reprises, « Twilight Dream », de Kenny Barron, et « Il faut tourner la page », d'Henri Salvador. Et pour parfaire le travail, des invitations ont été lancées à David Linx (voix), Baptiste Herbin (saxe) et des musiciens brésiliens. Un bel album personnel, audacieux et surprenant pour ses fans, aux confluents de plusieurs genres. Manu Le Prince sera le 26 octobre au New Morning, à Paris.

En l'espace de quelques années, Cecile McLorin Salvant s'est imposée parmi les nouvelles divas du jazz chanté. Récompensée d'un Grammy en 2016, la jeune chanteuse, qui a fait récemment la Une de plusieurs revues anglo-saxonnes, écrase par son talent et son art vocal nombre de ses contemporaines. « Dreams & Daggers » (Mack Avenue/PIAS), son dernier double CD, enregistré Live, notamment au Village Vanguard de New York, en est la parfaite illustration.

Principalement accompagnée par son trio conduit par Aaron Diehl (piano), Cecile McLorin Salvant promène sa voix troublante et suave de virtuose sur des standards, des compositions personnelles et une reprise magistrale d'incarnation de « Si j'étais blanche », interprété à l'origine par Joséphine Baker. Une grande dame du jazz vocal.