Pour aborder le passionnant ouvrage du Dr Philippe André, mieux vaut déjà bien connaître la vie de Robert Schumann (1810-1856). Non que le livre ne soit biographique, il l’est largement, au-delà de l’analyse très fouillée du psychisme et des phénomènes psychologiques et organiques qui ont conduit le compositeur allemand à se jeter à 43 ans dans le Rhin, geste suivi par un internement et sa mort deux ans plus tard. Mais les faits y sont souvent présentés dans un ordre qui appartient plus à l’analyse qu’à la chronologie et la lecture peut en paraître difficile en l’absence de repaires préalables. On pourra pour cela se reporter aux deux références citées par l’auteur, le livre très poétique de Marcel Brion, « Schumann et l’âme romantique » (Albin Michel, 1954), et celui plus factuel de la musicologue Brigitte François-Sappey, « Robert Schumann » (Fayard, 2000).
L’essai du Dr Philippe André, auteur d’une étude sur « les Années de pèlerinage » de Liszt, eut comme préambule sa thèse de doctorat, « Robert Schumann ou l’œuvre comme moyen de défense » (Montpellier 1979), travail ensuite remodelé et publié sous le titre de « Schumann, les chants de l’ombre » (J.-Cl. Lattès, 1982). La découverte et l’édition en 2006 des feuilles d’observation des Drs Richarz et Peters, qui accompagnèrent Schumann dans sa folie terminale dans la clinique d’Endenich, près de Bonn, l’ont conduit à réécrire son premier texte et à nous offrir ainsi son étude très convaincante.
Moteur de création
L’analyse très détaillée des grandes œuvres pour piano, cycles de Lieder et œuvres symphoniques et chorales de Schumann illustre le cœur de sa thèse, qui est que le compositeur vécut et composa sous la pulsion de deux « folies ». La première, puissant moteur, parfaitement intégrée à son mode de vie très bourgeois et familial, est sa « folie privée, dont émane pleinement sa "Phantasie" avec ses fantômes aux voix intérieures et lointaines, ses forêts obscures, ses cortèges d’amours sororales, d’images enfantines, de figures légendaires, de masques carnavalesques.... ». À ce cortège, représentatif du romantisme ambiant de l’époque, s’ajoute dès 1844 une folie organique, celle de la paralysie générale, Schumann ayant été infecté par le tréponème en 1832, très tôt dans sa vie d’étudiant à Leipzig. La syphilis, en l’absence de traitement, le conduira, par des chemins dont les descriptions cliniques très minutieuses nous sont fournies, à une mort horrible.
Les deux folies ont été, avec des mécanismes et des résultats divers et très bien argumentés dans ce précieux ouvrage, à la fois puissants catalyseurs et fortes entraves à une œuvre aux multiples facettes et d’une singulière richesse. Ainsi s’explique l’âme schumanienne, victime de deux forces. L’une enrichissante, analysée par le Dr André comme « une névrose phobique agrémentée de défenses obsessionnelles, toutes choses vraisemblablement sous-tendues par une économie limite ». L’autre destructrice, porteuse de délires qui firent de Schumann un « véritable héros tragique, à la fois coupable et non coupable de ce qui lui arrivait ». Par l’épisode du Rhin, un matin de Carnaval, « il ne fit que s’immerger dans la profondeur d’une image qu’il portait déjà en lui ».
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