Grands orchestres

Le jazz extralarge

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Publié le 03/04/2017
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Jazz-GEPW Cugny

Jazz-GEPW Cugny
Crédit photo : NOÉ CUGNY

Jazz-Laurent Cugny

Jazz-Laurent Cugny
Crédit photo : NOÉ CUGNY

Pianiste, compositeur, musicologue, professeur à la Sorbonne, auteur d'ouvrages de référence, comme sur l'histoire du jazz en France, Laurent Cugny maintient en vie depuis des années diverses grandes formations. Il fut notamment à la tête de l'Orchestre national de jazz (ONJ) entre 1994 et 1997, après avoir dirigé le big band Lumière dès 1979.

Laurent Cugny voue une admiration sans borne et inconditionnelle au maître arrangeur que fut Gil Evans (1912-1988), principalement connu pour ses travaux avec Miles Davis. Après l'avoir convié en 1987 pour une série d'enregistrements et de concerts, il décide de fonder le Gil Evans Paris Workshop, afin de perpétuer l'esprit musical de son mentor. Aux commandes de son big band atelier de 16 musiciens il vient de graver un double album, « Spoonful » (Jazz & People/PIAS). Le premier volet, « Time of the Barracudas », revisite des partitions écrites par le génial arrangeur, principalement des standards. Le second, « la Vie facile », est consacré au travail personnel du leader, avec aussi au programme des reprises des frères Gershwin ou de Django Reinhardt. Dans les deux cas, ces enregistrements mettent en valeur l'excellente qualité et la très grande valeur des jeunes et talentueux solistes présents. L'orchestre sera en concert le 7 avril à Paris, au New Morning.

Sur la planète des big bands, ceux conduits par le clarinettiste Woody Herman (1913- 1987) et baptisés Herds (troupeaux) ont toujours tenu une place à part dans l'histoire du jazz. C'est notamment au sein de son First Herd que sont nés en 1947 les Four Brothers (à l'origine Stan Getz, Zoot Sims, Herbie Stewart, Serge Chaloff), une extension de sa section de saxophones.

Grâce à de récentes rééditions (Jazz Connoisseur/Legacy), l'auditeur peut redécouvrir « The 3 Herds » (Columbia/Sony Music), qui réunit une série d'enregistrements réalisés entre 1945 et 1954. Figure sur ces plages oubliées l'élite des musiciens de la West Coast, alors à son apogée, avec des solistes admirables qui ont marqué cette époque épique du jazz californien et surtout au-delà. Outre ceux déjà mentionnés, Shorty Rogers, Pete Condoli (trompette) et Kai Winding (trombone).

Le blues, le swing et le Temps

Depuis plus de six décennies, le poète, écrivain et journaliste Jacques Réda est l'un des observateurs les plus attentifs de la scène jazz. Amoureux inconditionnel de la musique de XXe siècle, il vient de publier « Une civilisation du rythme » (Buchet-Chastel, 190 p., 23 €, CD inclus), un ouvrage dans lequel il se penche, souvent de façon très philosophique, sur deux éléments essentiels à la musique de jazz : le blues et le swing. Et un troisième, qui est déterminant : le Temps. Une analyse pertinente, passionnante et rythmée, effectuée à travers quatre big bands emblématiques et exemplaires du jazz, ceux de Fletcher Henderson, Jimmie Lunceford, Duke Ellington et Count Basie (que l'on réécoute avec gourmandise sur les 25 titres choisis pour le CD inclus). À une époque où l'appellation attrape-tout « musique afro-américaine » a tendance à se substituer à celle de jazz, pour des considérations de politiquement correct, le livre de Jacques Réda est un retour salutaire aux fondamentaux.

Didier Pennequin

Source : Le Quotidien du médecin: 9569