Mūza Rubackyté, des mémoires et un disque

La muse de Lituanie

Par
Publié le 05/02/2021
Avant un retour à Paris espéré en mars, la pianiste lituanienne Mūza Rubackyté publie de passionnants mémoires, « Née sous un piano », récit d’une carrière singulière doublée d’une vie au service de son pays. Et sort un nouveau disque.

Née en 1959 à Kaunas, dans un foyer de musiciens devenu exigu à son arrivée, celle que l’on avait prénommée la muse fut dès le berceau imprégnée de musique. Enfant prodigue éduquée dans la sévérité pédagogique d’un pays sous occupation soviétique, elle a dû passer par la rigueur moscovite, puis, les concours passés, se plier aux exigences de l’URSS, qui imposait de faire un trait sur une carrière internationale.

Dans « Née sous un piano » (Ovadia, 409 p., 30 €), Mūza Rubackyté raconte cette phase difficile de son apprentissage avec autant de sincérité que d’humour. C’est la partie la plus poignante et instructive de sa biographie, écrite à la première personne dans un style direct et une volonté de s’adresser aussi bien aux connaisseurs qu’à ceux qui sont peu au fait des codes de la planète pianistique.

Sa carrière internationale, à point de départ français, s’est ensuite envolée, avec des succès constants et mérités pour cette artiste exigeante et perfectionniste. Au profit du mouvement de libération de la Lituanie, auquel la pianiste est fière d’avoir pris part. Couverte d’honneurs dans son pays, elle en est une infatigable ambassadrice culturelle et y a fondé le Festival de piano de Vilnius, dont nous avions ici rendu compte en 2009. Les récits de voyages et de concerts, où abondent aventures et anecdotes, démythifient la carrière de concertiste doublée d’une vie de femme épanouie que l’on croit souvent être un long fleuve tranquille.

Aujourd’hui, Mūza Rubackyté est à la tête d’une longue discographie qui s’enrichit perpétuellement. En tête trônent ses enregistrements des « Années de pèlerinage » de Liszt, compositeur qu’elle a défendu dans le monde entier (Lyrinx), et les « Préludes et Fugues » de Chostakovitch, dont elle a repris le flambeau à leur créatrice Tatiana Nikolaïeva (Brillant Records). Dernier enregistrement, un récital consacré à Leopold Godowski, musicien juif né il y a juste 150 ans à Vilnius, alors surnommée la « Jérusalem du Nord », ainsi qu’à Chopin. Un autre Polonais, Karol Szymanowski, avec ses « 9 Préludes opus 1 », complète ce CD (Ligla/Socadisc). Si la Salle Gaveau est ouverte le 11 mars, Mūza Rubackyté y jouera la « Sonate en mineur » de Godowski.

Olivier Brunel

Source : Le Quotidien du médecin