Le Festival d’Automne à Paris consacre chaque année un « portrait » à un créateur des arts visuels. Cette année, c’est le chorégraphe français Jérôme Bel, qui, depuis vingt ans, agite la scène contemporaine. Ce pur produit de la Nouvelle Danse française, passé chez Angelin Preljocaj, déconstruit, interroge, provoque et ne laisse jamais indifférent.
En ouverture de cet hommage, on a pu revoir au Théâtre du Rond-Point l’étonnant « Gala », qui, depuis sa création à Bruxelles en 2015, n’a cessé de tourner dans le monde avec un succès mérité. Il est rare dans le paysage de la danse contemporaine, fut-elle « déstructurée » comme celle de Jérôme Bel, qui brise les codes du genre, qu’un spectacle de 90 minutes engendre rires et larmes et questionne autant sur les limites et les rapports d’un être humain avec son corps et le regard des autres.
« Gala » convoque professionnels et amateurs de tous âges et tous horizons, une vingtaine de personnes, dont certaines présentent un handicap, réel, comme pour une femme paraplégique dans son fauteuil et une autre trisomique, ou supposé, avec des personnes en surpoids, une jeune enfant, bref un panel mixte et hétérogène.
Tous sont d’abord confrontés à des figures imposées : un petit pas de danse classique, un tour de valse. Puis les choses se corsent avec le moonwalk de Michael Jackson, de la musique plus rythmée, une improvisation en silence. À ce stade, le regard du spectateur a le choix entre critique, ironie, indulgence, amour. Tout est possible et le spectacle peut être reçu formidablement si les spectateurs participent, jouent complètement le jeu.
La deuxième partie offre un exercice différent et autrement périlleux, qui teste les limites de chaque participant, entre culture et exhibitionnisme, et l’apprentissage du mouvement au sein d’un groupe.
Le miracle de ce spectacle, et on mesure l’immense travail de Jérôme Bel pour faire bouillir cette marmite-là, est que, très vite, les tabous physiques sont transcendés, le flux d’émotion l’emporte sur les préjugés et n’importe quelle tentative de critique, jugement, définition de l’amateurisme et du professionnalisme, du handicap même. Ce groupe, qui possède a priori un certain potentiel de ridicule, comme les y engagent les costumes kitsch dont on les a affublés et qu’ils s’échangent, projette dans la salle une grande dose de bonheur et suscite une admiration inconditionnelle. Encore une fois, la chose agit comme un miroir et chaque public peut réagir différemment. S’il joue le jeu, participe au même titre que les acteurs, on assiste à une grande leçon d’humanité (en novembre et décembre à Chelles, Compiègne, Saint-Ouen, Pantin, Bobigny).
Reprises et création
Il ne faut pas manquer dans la suite de ce parcours, à l'Espace Cardin (Théâtre de la Ville délocalisé), le film consacré à la danseuse Véronique Doisneau (spectacle créé au Palais Garnier), désopilant portrait ethnographique d’une danseuse du rang (le 5 novembre), ni le spectacle intitulé « Jérôme Bel », vaste projet de radicalisation de la danse et de ses pratiques (du 2 au 7 novembre). À l'Espace Cardin également, « Disabled Theater », autre pièce emblématique de Bel, qui poursuit avec le Théâtre Hora de Zürich, une troupe d’acteurs handicapés, le travail commencé avec « Gala » (du 3 au 6 novembre).
On pourra découvrir ensuite au Centre Pompidou le spectacle « Pichet Klunchun and myself », créé à Bangkok (du 15 au 18 novembre). Et à la Maison des Arts de Créteil, une création réalisée en septembre dernier par le Ballet de l’Opéra de Lyon mise en regard avec deux pièces de William Forsythe et Trisha Brown (du 29 novembre au 2 décembre).
« The Show must go on », spectacle iconoclaste convoquant aussi des handicapés, créé en 2001, sera donné par la Candoco Dance Company à Cergy, Saint-Quentin-en-Yvelines et Bobigny (6 au 16 décembre). Et l’hommage s’achèvera par une création, « Un spectacle en moins », au Théâtre La Commune d’Aubervilliers (du 8 au 10 décembre).
– Festival d'automne, www.festival-automne.com
– Espace Cardin, tél. 01.42.74.22.77, www.theatredelaville-paris.com
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