Opéra
Créé à Bruxelles en 2014*, « Au Monde » est le dernier opus de Philippe Boesmans, dont les opéras sur des livrets de Strindberg, Shakespeare, Schnitzler et Gombrowicz ont déjà été présentés avec un grand succès à Paris. Cette fois, c’est à Joël Pommerat qu’il s’est adressé, avec un livret réalisé d’après sa pièce éponyme. Cependant, n’est pas Maeterlinck qui veut, ni Tchekhov, les références littéraires clairement affichées. « Au Monde » narre une sombre histoire de famille dans laquelle les personnages peinent à exister, tant par leur caractérisation dramatique que vocale.
La partition orchestrale de Boesmans ne déçoit pas, riche et claire, bien écrite aussi pour la voix, mais un peu en vain, car on navigue entre un style énigmatique, parodique de Debussy, et celui des dialogues des films de Demy. La mise en scène, également signée Pommerat, est élégante, et le plateau de haut niveau, avec Frode Olsen, Charlotte Hellekant, Yann Beuron, Philippe Sly et surtout Patricia Petibon, qui réalise une vraie performance, à défaut d’incarner un vrai personnage. On a connu le compositeur belge en meilleure forme avec « la Ronde », « le Conte d’Hiver » et plus récemment « Julie », et on ne désespère pas de le retrouver en meilleure veine littéraire.
Cabaret berlinois
Plus réputé comme pédagogue que comme compositeur, l’Allemand Boris Blacher (1903-1975) eut les ailes brisées par l’arrivée du nazisme, qui le mit sur la liste des compositeurs de musique dégénérée. Il composa en 1943 en exil ce « Roméo et Juliette », dont l’Opéra de Lyon vient d’offrir la création française, et réduisit lui-même très respectueusement le livret, en anglais, à sa substance principale, avec une version musicalement légère, courte (75 minutes), adaptée à la production de tréteaux itinérants. Sept chanteurs, neuf musiciens, un piano et un curieux mais efficace recadrage dans le contexte du cabaret berlinois, avec une meneuse de revue qui chante, en allemand, quelques « Songs » semblant sortis de chez Kurt Weill. Le langage use de polytonalité et parfois de dodécaphonisme mâtiné de jazz, avec une orchestration très légère.
C’est au Théâtre de la Croix-Rousse, avec lequel le spectacle est coproduit, que l’Opéra de Lyon a programmé cette création originale, et son directeur Jean Lacornerie en a réalisé la mise en scène. Réalisation extrêmement efficace, dans une scénographie assez réaliste et économe de Lisa Navarro, à qui on reprochera tout de même de reléguer le petit orchestre à l’arrière de la scène, au détriment de l’efficacité de cette orchestration minimale, parfaitement menée par le chef Philippe Forget.
Les chanteurs du Studio de l’Opéra de Lyon assurent cette production avec beaucoup d’enthousiasme et de talent (Tyler Clarke, Laure Barras, la diseuse April Hailer...). Mais la musique n’arrive pas à la hauteur de celles, contemporaines, de Weill, Krenek et Hindemith, et, sachant qu’à la création scénique au festival de Salzbourg de 1950, les interprètes en étaient Hilde Güden et Hermann Uhde, on se prend à rêver que l’Opéra de Lyon ait réalisé un projet plus ambitieux, dans le cadre du festival d’opéra, par exemple, avec des interprètes de plus grande pointure.
* Cypres vient de publier sur 2 CD l’enregistrement de « Au Monde » avec les interprètes de la création bruxelloise.
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