CINEMA - « Alceste à bicyclette », de Philippe Le Guay

Amis du genre humain

Publié le 17/01/2013
Article réservé aux abonnés
1358389064401604_IMG_96905_HR.jpg

1358389064401604_IMG_96905_HR.jpg
Crédit photo : M. TOUZÉ

QUAND PHILIPPE LE GUAY, qui a déjà tourné deux films avec lui (« l’Année Juliette » en 1995 et « le Coût de la vie » en 2003), va voir Luchini à l’île de Ré pour lui proposer le rôle du bourgeois coincé des « Femmes du 6e étage », qui aura le succès que l’on sait, il le trouve, comme presque toujours, plongé dans « le Misanthrope ». Les deux hommes se baladent dans la campagne, Luchini déclame et confie qu’il aime autant Philinte qu’Alceste. « Ce serait formidable d’en faire un film », dit Le Guay. Et voilà pourquoi le générique indique : « Sur une idée de Fabrice Luchini et Philippe Le Guay », le réalisateur ayant signé le scénario.

Sur l’île de Ré, donc, un acteur retiré du monde reçoit la visite d’un collègue célèbre pour incarner un neurochirurgien dans une série télé. Il vient lui proposer de jouer « le Misanthrope » et, pour le convaincre, accepte de répéter avec lui, pendant quelques jours, la grande scène 1 de l’acte 1, entre Philinte et Alceste. C’est tout ? Presque. Nul besoin cependant d’être un spécialiste de Molière pour apprécier la joute puissance 2 entre les deux hommes via les deux personnages, dont ils échangent les rôles en tirant au sort.

Les chemins de l’île de Ré vide de ses touristes, la pluie, les bicyclettes, une troublante Italienne (Maya Sansa) et une apprentie comédienne adepte de films X, plus quelques figures locales, ajoutent du piment à la confrontation. Mais c’est elle qui fait tout le sel du film, avec ses dialogues ciselés qui contiennent une dose bienvenue d’autodérision pour les deux acteurs. Fabrice Luchini a à peine besoin de faire du Luchini, le rôle le fait à sa place avec les morceaux de bravoure de Molière, les imprécations atrabilaires ou les citations de Jouvet. Lambert Wilson est élégant avec un personnage à la limite de la caricature.

L’amour de la langue, de sa musique transpire mais cela reste du cinéma qui respire. « Quoi de neuf ? Molière ! », la formule est toujours valable.

RENÉE CARTON

Source : Le Quotidien du Médecin: 9210