UN PROJET DE DÉCRET fixant les modalités du sauvetage de l’allocation supplémentaire vieillesse (ASV, qui représente aujourd’hui 39 % des pensions de retraite des médecins libéraux) circule. Ce « brouillon » a été posté par le ministère de la Santé – apparemment trop tôt et par erreur, le texte étant accompagné d’une lettre du ministre qui n’était ni datée, ni signée – et envoyé aux syndicats médicaux ainsi qu’aux responsables de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF). Il donne une idée de ce que sera l’ASV à… l’été 2012.
Car c’est le premier enseignement de cette lettre partie trop tôt : initialement programmée pour entrer en vigueur dès le 1er janvier prochain, la réforme attendra six mois de plus. Quant à ce qui guette les cotisants et les retraités, les choses se précisent. Il est déjà acquis dans la nouvelle convention que l’assurance-maladie va continuer à prendre en charge les deux tiers de toutes les cotisations ASV des médecins du secteur I. Au-delà, le projet de décret précise la mesure dans laquelle ces cotisations vont augmenter et les prestations se réduire.
Glissement.
Et les plans glissent par rapport à ce qui était prévu au mois de juillet (doublement du montant des cotisations sur trois ans) : désormais, la hausse des cotisations est de 75 % et s’étale sur 5 ans – ce qui en atténue l’effet pour les médecins du secteur II, qui paient intégralement leurs cotisations. Côté prestations, le nombre de points distribués serait inchangé mais la valeur du point diminuerait progressivement, passant en cinq ans de 15,55 euros à 14 euros pour les retraités et de 15,55 euros à 13 euros pour les pensions non liquidées (ceci quelle que soit la période d’acquisition de ces points). Il n’y aurait pas d’exonération de cotisation pour les bas revenus. Ni de régime dérogatoire pour les médecins qui cumulent emploi et retraite.
À la CSMF, le Dr Michel Chassang répète que la réforme sera douloureuse pour tout le monde mais il a fait ses calculs : « La hausse des cotisations va représenter pour chaque médecin de secteur I 10 euros de plus en 2012, 30 euros en 2013 et 50 euros l’année suivante… : la facture s’est allégée pour les praticiens en activité par rapport à ce que prévoyait la première mouture de la réforme, en juillet (elle était alors plutôt de 120 euros de plus en trois ans) ; il n’y a pas de détérioration de la retraite. Le secteur II n’est pas assommé. Et le régime est sauvé. » Le Dr Claude Leicher, président de MG-France, fait lui aussi un diagnostic à la fois réaliste – « Les décisions finalement prises ne satisferont personne. » –et pragmatique : « On ne sacrifie pas les jeunes, ni les retraités. On garde la répartition. Et on fait une réforme pérenne. »
Le Dr Gérard Maudrux, président de la CARMF, n’est pour sa part pas convaincu : « Les pouvoirs publics disent qu’ils maintiennent le régime pour 30 ans mais ils fixent de premiers rendez-vous de réajustement dans deux ans et demi ! Les mesures proposées ressemblent à celles défendues par l’IGAS [l’Inspection générale des affaires sociales a rendu en 2004 un rapport sur l’ASV préconisant une réforme radicale] un petit peu adoucies par un lissage dans le temps… » Dans son sillage, les retraités de la FARA (Fédération des associations régionales des allocataires de la CARMF) sont sur le pied de guerre ; ils accueillent « avec stupeur les dernières propositions des pouvoirs publics » et les rejettent.
Xavier Bertrand, lui, a réaffirmé vendredi dernier sa volonté de « pérenniser le régime ASV » devant les cadres du Centre national des professions de santé (CNPS, libéraux de santé). « Nous sommes proches d’un accord qui préserve l’engagement de l’État, de l’Assurance-maladie et des professionnels, a indiqué le ministre de la Santé. Nous procédons aux derniers ajustements. »
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