Alors que la grève interprofessionnelle du jeudi 5 décembre contre la réforme des retraites s'annonce très suivie, les syndicats de médecins libéraux ne trouvent toujours pas leur compte non plus après avoir rencontré, le 3 décembre, le Haut Commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye.
Selon la CSMF et la FMF, cette deuxième réunion sectorielle n'a permis de lever aucun doute sur les points clés : la garantie du rapport cotisations/prestations, le sort des réserves, la future gouvernance ou la sanctuarisation du régime ASV.
Rabot
Sur le rapport cotisations/prestations, l'équipe Delevoye a présenté deux nouveaux cas types de revenus (à deux PASS – soit 80 000 euros – sur une carrière de 30 ans) avec étude d'impact de la réforme pour les médecins en secteur I et en secteur II. Les calculs ont été effectués selon des paramètres déjà présentés (réduction de l'assiette de CSG et élargissement de celle cotisations retraite, indexation des prestations sur l’évolution des salaires).
Selon le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, la diminution calculée entre la pension moyenne versée par le régime actuel et celle du futur régime universel serait de 8,7 % en secteur I (avec des revenus d'environ 80 000 euros), soit 44 600 euros pour le régime actuel mais seulement 40 731 euros avec le futur régime universel. En secteur II, la baisse serait limitée à 5,3 % (44 803 euros avec le régime actuel, 42 431 euros avec le système universel).
Pas vraiment de quoi rassurer d'autant que les syndicats doutent de la fiabilité des paramètres avancés (évolution des salaires, taux de CSG, etc.). Lors de son dernier colloque, la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF) avait présenté des simulations beaucoup plus alarmistes de chute des pensions – de 26 % à 37 % – selon les cas de figure.
En découdre ?
Autre incertitude : les réserves constituées par la profession pour anticiper la baisse démographique. « Le Haut Commissaire affirme qu'une partie des 7 milliards d'euros de nos réserves serviront à payer les droits acquis, soit 2 à 3 milliards d'euros. Que va devenir le reste ? Qui va le gérer ? On n'a pas la réponse », alerte le Dr Olivier Petit, en charge des retraites à la FMF.
Le Haut Commissaire a confirmé une troisième réunion sectorielle avec les médecins libéraux, le 7 janvier. Mais tout sera-t-il déjà joué ? « Nous ne sommes pas du tout rassurés par les propositions du Haut Commissaire et nous craignons de devoir payer dans le régime universel, déclare le Dr Petit. Cela n'est pas acceptable. »
Plongée dans ce grand flou, la CSMF est « prête à en découdre ». « Elle n’hésitera pas à appeler tous les médecins libéraux à engager un bras de fer avec le gouvernement pour sauver leur retraite », prévient le syndicat. Le SML estime qu'une large mobilisation des professions libérales devient de plus en plus « inéluctable », faute de garanties.
Le mécontentement gagne enfin les organisations de médecins juniors, à l'instar de ReAGJIR (Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants). « Nous demandons que les jeunes soient associés aux réflexions mais aussi aux négociations car cette réforme les concerne principalement. Il paraît aberrant d’écarter les premiers concernés. »
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