Les sénateurs examinent le PLFSS

Le gouvernement peine à convaincre sa majorité sur le traitement des déficits et de la dette

Publié le 12/11/2009
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Crédit photo : S TOUBON

MALAISE à droite. C’est l’impression qui est ressortie de la discussion générale au Sénat sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2010). Rarement en effet le gouvernement avait essuyé autant de critiques, de la part de ses soutiens habituels, sur ce texte emblématique du budget de la Sécu.

Car si les attaques de la gauche étaient attendues (budget « insincère », « inégalitaire », « inconséquent »), la majorité n’a pas épargné les ministres concernés et ouvertement mis en doute les choix du gouvernement pour traiter les déficits des années à venir (30 milliards d’euros par an en moyenne) et pour gérer la dette accumulée (qui s’élève déjà à 92 milliards et pourrait augmenter de 170 milliards d’ici à 2013). Le message adressé par nombre de sénateurs UMP et centristes est clair : la crise ne justifie pas tout et il est peu responsable de financer la Sécurité sociale à crédit en renvoyant la dette à la charge des générations futures, enfants et petits-enfants. La pérennité de notre modèle social actuel est menacée.

Les arguments d’Éric Woerth, ministre du Budget et des Comptes publics, sont pourtant rodés depuis des semaines. La crise provoque une situation exceptionnelle qui prive la Sécurité sociale de 21 milliards d’euros de recettes sur 2009 et 2010, un choc impossible à compenser. Il convient dans ce contexte de préparer au mieux la sortie de crise en renouant avec la croissance, donc sans alourdir le fardeau des Français et des entreprises. Trois options sont écartées, qui risqueraient justement de freiner la reprise : la baisses des prestations, l’augmentation massive des prélèvements obligatoires et un « débat caricatural » sur les niches sociales dès lors que les allégements de charges « sont la mesure de la politique de l’emploi la plus efficace ». D’où la stratégie cette année d’un recours à la trésorerie de l’ACOSS (la banque de la Sécu) qui renvoie les solutions radicales à plus tard. En attendant la protection sociale joue pleinement son rôle d’amortisseur ou de stabilisateur.

Aucune date prévue pour le retour à l’équilibre !

Mais ce discours peine à convaincre. Alain Vasselle (UMP, Oise) a évoqué des « perspectives alarmantes à moyen terme », Jean-Jacques Jégou (Union Centriste, Val-de-Marne) a jugé que le projet proposé n’était « pas soutenable » et souligne « les limites du financement de notre système et l’urgence des décisions à prendre ». Plusieurs sénateurs de droite ont relevé que, pour la première fois, ce PLFSS ne fait pas mention d’une quelconque perspective de retour à l’équilibre, fût-elle lointaine. Beaucoup y voient la marque d’un certain fatalisme et de l’inaction. Alain Milon (UMP, Vaucluse) souligne qu’il existe bel et bien un déficit structurel (non lié à la crise) de plus de 10 milliards d’euros, que cette situation « impose des réformes » et « une modification des recettes », qui doit passer, selon cet élu, par un élargissement de l’assiette des prélèvements et un meilleur ciblage des allégements de charges. Nicolas About (Union Centriste, Yvelines) n’a pas mâché ses mots. « À première vue, ce PLFSS 2010 est catastrophique, il y a une apparence de Bérézina. À y regarder de près, il n’est pas totalement désespérant… ».

Attaqué par la droite sur le volet « recettes » de ce budget, le gouvernement s’en tire beaucoup mieux côté dépenses. De nombreux sénateurs ont salué le respect de l’Ondam 2009 (objectif national de dépenses d’assurance-maladie) et les taux directeurs « volontaristes » assignés à la médecine de ville et à l’hôpital en 2010 (+2,8 % pour chaque secteur dans le cadre d’un ONDAM général de 3 %). De quoi apporter un peu de baume au gouvernement après ces coups de semonce. L’examen du PLFSS au Sénat doit se terminer aujourd’hui ou demain.

 CYRILLE DUPUIS

Source : lequotidiendumedecin.fr