ALORS QU’ILS ÉTAIENT exactement, selon l’Ordre, 9 999 en 2009 dont 72 % de généralistes, les médecins remplaçants constituent une catégorie de praticiens encore trop mal connue. Une thèse de médecine générale, couronnée par l’union régionale des médecins libéraux d’Alsace (URMLA), se propose de mieux les découvrir.
Présenté en 2010 par le Dr Anne Herrenschmidt Kohler, ce travail s’est basé sur des entretiens réalisés avec trois groupes de remplaçants – un groupe d’hommes, un groupe de femmes et un groupe mixte – qui ont été amenés à s’exprimer sur leurs pratiques, ainsi que sur les atouts et les inconvénients de leur statut. Faisant appel à la méthode des « focus groupes » utilisée pour les enquêtes d’opinion, cette thèse a révélé un certain nombre de constantes chez les médecins remplaçants. Ceux-ci estiment que le fait d’être un « intervenant extérieur » dans la vie du cabinet et dans son activité habituelle, est un avantage aussi bien pour le médecin remplacé que pour les patients, permettant de nouveaux regards et de nouvelles écoutes. Par contre, il est impératif que le médecin remplacé et le remplaçant communiquent et se rencontrent avant et après chaque remplacement, tant en matière de traitements en cours que d’organisation du travail.
Caméléons.
Les remplaçants éprouvent souvent un besoin de reconnaissance et vivent parfois mal le fait que certains patients ne les considèrent pas comme de « vrais docteurs », alors qu’ils aspirent justement à être acceptés pour eux-mêmes. Beaucoup ont du mal à trouver l’équilibre entre leur propre pratique et l’adaptation à celle du médecin remplacé. Si certains choisissent de jouer le « caméléon » et se conforment aux habitudes du médecin remplacé pour ne pas inquiéter les patients, d’autres n’hésitent pas à s’en affranchir s’ils estiment que cela peut améliorer la qualité des soins. La thèse montre aussi que les femmes remplaçantes ont plus de difficultés à s’imposer aux patients que les hommes, et se sentent plus vulnérables face aux tentatives de séduction et au sexisme de certains malades. Par contre, les patientes s’ouvrent souvent plus auprès de la remplaçante d’un médecin homme que ce qu’elles ne feraient en temps normal, constatent plusieurs remplaçantes.
Les remplacements permettent aux jeunes médecins d’effectuer plusieurs expériences avant de choisir exactement leur lieu et leur mode d’installation ; ils les privent en revanche du suivi à long terme des patients, ce qui risque de leur donner à terme une vision trop « organique » de la médecine, relève pour sa part le Dr Pierre-Paul Schlegel, généraliste à Mulhouse et président de l’URMLA. Il n’en reste pas moins qu’à côté des jeunes médecins qui s’installent de plus en plus tard – actuellement à 39 ans en moyenne, contre 30 ans il y a encore une vingtaine d’années –, un nombre croissant de médecins seniors sont tentés par ce type d’exercice, notamment pour être libéré des tâches de gestion et d’administration. « En Alsace aussi, on voit des médecins installés redevenir remplaçants ou vacataires », constate l’URMLA, même si le phénomène est encore très limité.
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