Manif des psychiatres, grogne des biologistes, fermeture des cabinets des libéraux, défilés d’internes… En cette fin d'année, les signes de malaise se multiplient concernant les blouses blanches. La mauvaise humeur prend, pour partie, la forme de revendications financières, ce qui dans le contexte d’inflation actuel se comprend aisément. Mais elle en dit long aussi sur le ras-le-bol et la fatigue d’un secteur épuisé par trois années de crise sanitaire et sursollicité comme jamais ces derniers temps, à l’heure d’une triple épidémie qui surcharge la médecine de premier recours et engorge l'hôpital.
Urgences, maternité, pédiatrie : ça coince sur les principales portes d’entrée du système de soins. Et si l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) dresse un bilan plutôt positif des coups de pouce décidés in extremis l’été passé pour soutenir et réorganiser la permanence de soins et les soins non programmés, il est à craindre que cela ne suffise pas. Ces dernières semaines, c’est l’accès aux soins de la population qui semblait menacét. Au point que les sociétés de pédiatres et d'infectiologues ont dû à deux reprises tirer le signal d’alarme : sur la saturation des services pour cause de bronchiolite en octobre ; puis sur une pénurie d’amoxicilline extrêmement préoccupante, puisque certains préconisent déjà des restrictions de prescription concernant cette molécule. Le manque de médecins traitants - dans les déserts médicaux, mais pas seulement — affole par ailleurs les pouvoirs publics. Lors d’un Live chat la semaine dernière avec les lecteurs du « Quotidien », Thomas Fatôme, Directeur général de la Cnam, a insisté sur l’urgence de mettre en place des équipes de soins autour du généraliste, faisant même de ce défi la priorité de la nouvelle convention.
On comprend la préoccupation des autorités sanitaires. En ce début d’hiver, le système donne un peu l’impression de prendre l’eau de partout. Cliniques et hôpitaux n'ont toujours pas rattrapé les retards de prise en charge liés au Covid. Et un récent rapport de Médecins du Monde fait le lien entre l’accès aux soins de plus en plus malaisé des plus précaires et l’engorgement des structures de droit commun…
Face à cette situation, les pouvoirs publics doivent absolument bouger. D’autant que députés et sénateurs mettent l’exécutif sous pression. À court terme, il s’agit de dégager des moyens exceptionnels afin de permettre au système de santé de passer l’hiver sans trop de dommages. À plus longue échéance, il y a toute une réflexion à mener sur la redéfinition du temps médical, la souveraineté sanitaire et les modes de rémunération des professionnels, par exemple. Ce pourrait être au menu du volet santé du Conseil national de la refondation qui a procédé lundi dernier à un premier point d'étape. La démarche est censée aboutir à la fin du premier trimestre 2023. Il ne faudrait pas que la montagne accouche d'une souris.
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