L’échec des politiques menées depuis 30 ans

Publié le 07/02/2013
Article réservé aux abonnés

LES MESURES instaurées par les divers gouvernements contre la désertification médicale depuis le début des années 1980 n’ont eu qu’une « portée limitée », affirme le groupe de travail sénatorial.

Hervé Maurey et Jean-Luc Fichet dressent un tableau sombre. La répartition des professionnels de santé est « disparate » et « problématique ». Pourtant, « le pays compte quelque 200 000 médecins aujourd’hui, il n’en comptait que 100 000 en 1980, époque où le manque de médecins ne se ressentait pas », assènent les deux sénateurs.

La situation s’est détériorée au point que trois millions d’habitants rencontrent une difficulté majeure d’accès aux soins. Les délais de rendez-vous s’allongent. Selon les données de la CNAM, citées par le rapport, ils atteignent 103 jours pour un ophtalmologiste, 51 jours pour un gynécologue et 38 jours pour un dermatologue. « Cette situation est extrêmement préoccupante, car elle peut priver les patients des soins dont ils ont besoin, ou retarder ceux-ci », écrivent les sénateurs. Les conditions financières sont « aggravantes ». Les dépassements d’honoraires compliquent en particulier l’accès aux gynécologues et ophtalmologistes, multipliant par quatre la « proportion des Français vivant dans un désert médical ».

Les limites de la planification régionale.

Comment en est-on arrivé là ? Les parlementaires posent un diagnostic sans concession. À leurs yeux, les pouvoirs publics ont pêché en ne prenant aucune mesure de régulation directe basée sur le conventionnement sélectif comme pour les pharmaciens, les infirmiers, les kinés, les sages-femmes, les chirurgiens dentistes et les orthophonistes. Les recettes incitatives auraient montré leurs limites. La planification régionale de l’offre de soins souffre d’une « limitation majeure », selon les sénateurs : « Seul le volet hospitalier du schéma régional d’organisation des soins (SROS) est opposable », le volet ambulatoire ne l’étant pas. L’organisation « fragile » de la PDS dans certains secteurs est également pointée du doigt.

Le regroupement en maison ou pôle de santé n’est pas la panacée. Il « accélère le processus de concentration géographique des professionnels de santé ». Les mesures incitatives sont jugées « peu lisibles », « redondantes » et « onéreuses ». L’avenant 20, qui autorisait la majoration de 20 % des honoraires des généralistes exerçant en groupe dans les zones déficitaires est taillé en pièces. Le dispositif a coûté 20 millions d’euros pour 773 bénéficiaires en 2010, et n’a amené que 50 nouveaux médecins à s’installer dans une zone déficitaire depuis 2007. Un « effet d’aubaine » déjà dénoncé par la Cour des Comptes. Les contrats d’engagement de service public (CESP) ont eu un maigre succès. Seuls 350 étudiants et internes signataires sur les 800 potentiels ont signé ce contrat qui permet de bénéficier d’une bourse mensuelle de 1 200 euros bruts contre un engagement à exercer dans une zone sous dotée.

 CHRISTOPHE GATTUSO

Source : Le Quotidien du Médecin: 9216