« C'était la toute première communauté professionnelle territoriale de santé créée dans les Hauts-de-France et ce sera la première CPTS… dissoute de France », se désole le Dr Xavier Lambertyn, président de la CPTS du pays de Bray, dans l'Oise (60).
Le généraliste installé depuis 1996 à Lachapelle-aux-Pots ne décolère pas. Après une réunion mi-mai « qui s'est mal passée » avec l'ARS Hauts-de-France, le médecin de 58 ans a décidé de démissionner de ses fonctions. Informés de cette décision, les membres du bureau de l'association lui ont aussitôt emboîté le pas.
Démographie déficitaire
Que s'est-il passé ? Après trois ans de fonctionnement avec un financement de l'ARS, la CPTS ne pourra pas signer l'accord conventionnel interprofessionnel (ACI), faute d'être en capacité de remplir l'une des missions socles (obligatoires) qui est de faciliter l'accès à un médecin traitant. « J'ai bien expliqué que cette mission était irréalisable en raison de la démographie médicale largement déficitaire dans notre secteur, explique le généraliste adhérent à la FMF. On nous a alors répondu qu'on ne pouvait pas nous donner ce contrat. »
Le médecin rapporte une autre réponse « ubuesque » de l'ARS sur la mission de prévention. « Le fait d'avoir vacciné la population contre le Covid ne constitue pas des actes de prévention pour l'ARS, qui dit qu'on aurait dû formaliser le plan d'action, déclare-t-il. Mais pendant le Covid, on avait d'autres chats à fouetter que de nous réunir pour faire de l'administratif. »
Dans ce contexte, le généraliste dénonce « une administration qui veut nous mettre dans des cases ». « La CPTS doit être un outil pour les professionnels de santé afin de rendre service à la population, et non pas une charge administrative », recadre le Dr Lambertyn.
« Ils veulent des chiffres, des courbes »
Au « Quotidien », le généraliste confie que sa structure s'est largement mobilisée pour prendre en charge la population rurale depuis trois ans : création de centre de vaccination Covid, organisation locale pour vacciner la population, maintien et suivi des personnes âgées à domicile. « Nous avons pu travailler en exercice coordonné avec les infirmiers, les kinés, l'hôpital et éviter 220 hospitalisations pour les personnes âgées donc des économies pour la Sécu, énumère le médecin. Mais on a l'impression que l'ARS s'en fiche ! Ils veulent des chiffres, des courbes, des indicateurs ! Je n'en veux pas de ces carcans. »
Une assemblée générale extraordinaire de la CPTS est prévue le 8 juin pour acter cette démission qui pourrait entraîner la dissolution de ce collectif libéral regroupant une cinquantaine de professionnels de santé – dont dix médecins.
Mise à jour (24 mai 2022) :
Suite à la parution de notre article le 20 mai 2022, l'ARS Hauts-de-France apporte les précisions suivantes :
« L’accord conventionnel interprofessionnel (ACI) permet d'apporter un financement pérenne aux CPTS, afin de les soutenir au mieux dans les réponses qu’elles apportent aux besoins de santé de la population. En souscrivant au contrat défini dans l'ACI, les CPTS s'engagent en retour de ce financement à réaliser plusieurs missions. Certaines sont obligatoires et dites "socles", notamment des missions en faveur de l’amélioration de l’accès aux soins. D'autres sont optionnelles, pour lesquelles les CPTS peuvent percevoir un financement complémentaire.
Dans le cadre de la revue de gestion réalisée entre les parties au contrat (la CPTS du pays de Bray, l'ARS et l'assurance maladie), il est apparu que la CPTS ne met pas en œuvre certaines de ses missions socle. En effet, la CPTS s’oriente à ce jour exclusivement sur la prise en charge de la personne âgée et n’envisage pas la mise en place d’autres missions cependant obligatoires.
En conséquence, et dans un contexte où les tentatives de dialogue souhaitées par l'ARS et l’assurance maladie n'ont pas trouvé d'écho auprès de la CPTS, les financements prévus en contrepartie de la réalisation de ces missions socles ont été suspendus. Il a toutefois été proposé un accompagnement vers une nouvelle forme d’organisation territoriale adaptée aux ambitions des porteurs et à la spécificité du territoire avec l’enjeu de maintenir la continuité des financements des actions portées. Cette proposition ne semble pas, en l’état, recueillir l’adhésion du président de la CPTS. »
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