Pas le choix… C’est dans cet état d’esprit que les autorités sanitaires tentent aujourd’hui de trouver des solutions inédites pour résoudre une pénurie médicale plus sérieuse et préoccupante que jamais. Ce contexte d’urgence pousse à privilégier les solutions les plus efficaces et aussi les plus rapides. La hausse forte du numerus clausus mise en œuvre ces dernières années remplit le premier objectif, mais pas le second : il faut beaucoup trop de temps pour former un médecin. À l’inverse, la coercition à l’installation peut être immédiate, mais sa mise en œuvre se heurterait à des levées de boucliers côté médecins. Et même si, dans cette hypothèse, les pouvoirs publics gagnaient leur bras de fer avec les disciples d’Hippocrate, il n’est pas certain que les résultats attendus seraient au rendez-vous : avant nous, nos voisins allemands ont essayé de réguler les installations, sans vraiment de résultats tangibles jusqu’à présent.
Pour remédier à la crise démographique, les pouvoirs publics poussent donc, pour l’heure, deux autres solutions. La mise en place d’une quatrième année d’internat en médecine générale, avec fléchage vers les déserts médicaux, peut apporter du sang neuf dans les zones sous-denses, surtout si elle est combinée avec la suppression des cotisations Carmf des médecins en cumul emploi-retraite. Mais outre que ces deux axes se heurtent au tollé, des jeunes dans le premier cas, et de la Caisse dans le second, il n’est pas dit que cela suffise à régler la question de l’accès aux soins.
Reste à attaquer le problème par le biais de l’interpro. Pour libérer du temps médical, c’est la voie qui est privilégiée depuis au moins cinq ans avec la multiplication des délégations de tâches aux non médecins. Et ça marche. Vaccinations, renouvellement de prescriptions, accès direct aux paramédicaux, suivi de certaines maladies chroniques et même certificats de décès : des pans entiers de compétences jusque-là réservées au corps médical sont désormais dévolus à d’autres soignants. PLFSS, initiatives parlementaires, accords conventionnels, expérimentations : ce chantier se fait de façon si rapide, si massive et si anarchique qu’on peine parfois à en comprendre la logique. Et la déclaration commune, et si proactive, des différents Ordres n’a rien fait pour dissiper la confusion. Face à cette évolution, les médecins réclament, à juste titre, des garanties pour le contrôle du parcours de soins, et des compensations financières aussi, puisqu’inévitablement ce mouvement de transfert se soldera pour eux par la perte d'actes simple et davantage d’actes lourds et complexes. C’est un des grands enjeux des négociations conventionnelles qui ont commencé : 18 ans après la création du parcours de soins en ville, réaffirmer la place et le rôle du médecin traitant et (re)valoriser ses missions de base.
Exergue : L’urgence démographique pousse à privilégier les solutions les plus efficaces et aussi les plus rapides.
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