Le ton monte entre les institutions médicales canadiennes et certains médecins de Colombie-Britannique, cette province située au bord de l’océan Pacifique. Dans un communiqué commun publié le 6 mai dernier, le College of physicians and surgeons of British Columbia, l’équivalent du Conseil de l’Ordre, et la First Nations Health Authority, un organisme en charge des programmes de santé aborigènes, ont menacé de sanctions les praticiens qui propageraient des informations en contradiction avec les recommandations officielles.
Il leur est reproché, notamment, de tenir des propos anti-masques, anti-vaccins et de prendre position contre les mesures de distanciation physique et de confinement. La mise en garde concerne également la promotion de traitements contre le Covid-19 qui ne seraient pas largement approuvés par la communauté scientifique.
Liberté d'expression ou censure ?
Censure ? Entrave au débat scientifique ? Pas pour le Collège pour qui ces déclarations publiques « sont source de confusion et potentiellement dangereuses pour les patients ». Ces discours de désinformation seraient plus particulièrement néfastes pour les populations aborigènes, deux fois plus impactées par l’épidémie de coronavirus que le reste de la population de Colombie-Britannique, et en proie à d’importantes difficultés d’accès aux soins. Ceux qui se rendent coupables de tels propos s’exposent à « une enquête de la part du collège et à des mesures réglementaires, si les faits sont avérés », prévient le Dr Heidi Oetter, la directrice générale du Collège.
En France, le code de déontologie médicale invite également les médecins à faire preuve de prudence lorsqu’ils s’adressent au grand public. « Lorsque le médecin participe à une action d'information du public à caractère éducatif, scientifique ou sanitaire, quel qu'en soit le moyen de diffusion, il ne fait état que de données confirmées, fait preuve de prudence et a le souci des répercussions de ses propos auprès du public », dispose l’article R.4127-13 du code de la santé publique.
Au mois d’avril 2020, en pleine polémique sur l’hydroxychloroquine, le Conseil national de l’Ordre des médecins avait recommandé aux médecins de rester à l’écart du débat médiatique sur le sujet et d’attendre les conclusions des scientifiques sur l’utilité de cette prescription. Plus récemment, il avait alerté la communauté médicale sur un protocole anti-Covid sans efficacité prouvée contre le SARS-CoV-2. Selon nos informations, plusieurs médecins ont été rappelés à l'ordre par le CNOM. En décembre 2020, un pneumologue avait été interdit d'exercer pendant 5 mois après ses propos anti-masque. Plus récemment, une généraliste de l'est de la France a été radiée pour ses prises de position publique... et en raison de ses penchants pour des pratiques médicales hors les clous.
Scepticisme ou conspirationnisme ?
Selon le Collège de Colombie-Britannique, certains médecins ont largement franchi ce cap. Dans un article publié le 11 mai, CBC News mentionne le cas de plusieurs praticiens très populaires sur les réseaux sociaux. L’un d’eux, le Dr Stephen Malthouse, a participé à plusieurs manifestations contre le masque et les mesures de distanciations physiques. Il a laissé entendre que la « soi-disant épidémie » de coronavirus n’était pas plus mortelle que la grippe. Interrogé par l’agence de presse The Canadian Press, le médecin invoque sa liberté d’expression dans le cadre d’un débat scientifique.
La presse canadienne évoque aussi le cas du Dr Bill Code, anesthésiste. En mars dernier, il assurait avoir guéri des patients du Covid-19 avec un traitement à base d’hydroxychloroquine et de vitamines, suggérant que les autorités scientifiques et les politiciens mentaient sur l’efficacité de ces médicaments contre la maladie.
Au mois d’avril, un généraliste s’illustrait en déclarant sur un site anti-vaccin que le sérum de Moderna était « clairement plus dangereux que le Covid-19 ». Il affirmait que les vaccins ARNm relevaient d’une thérapie génique expérimentale modifiant l’ADN des patients, un argument fréquemment repris par les conspirationnistes.
CBC News rappelle que seulement 54 évènements indésirables graves (dont des anaphylaxies) avaient été rapportés au 1er mai au Canada, sur 1,85 million de doses injectées. Parmi les personnes vaccinées, quatre sont décédées au cours des 30 jours précédant cette date, sans lien prouvé avec le vaccin. L’épidémie a fait 1 622 morts en Colombie-Britannique.
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