L'agence nationale du médicament (ANSM) a annoncé jeudi 8 juin avoir de nouveau saisi la justice sur des dysfonctionnements de l'IHU de Marseille à l'ère Raoult. Cette décision intervient après analyse d'une étude, cosignée par Didier Raoult, portant sur plus de 30 000 patients Covid traités à l'Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection pendant deux ans.
Cette étude « peut être qualifiée de RIPH (recherche impliquant la personne humaine ) de catégorie 1 » et aurait donc « dû bénéficier d'un avis favorable d'un comité de protection des personnes et d'une autorisation de l'ANSM », explique l'agence.
Avec sept co-auteurs, dont la plupart exercent encore à l'IHU, le Pr Raoult avait cosigné en mars un « pre-print », c'est-à-dire une version non relue par des pairs, de son étude sur des patients Covid, concluant que l'administration d'hydroxychloroquine (ou d'ivermectine) a réduit la mortalité de malades du Covid.
Fin mai, seize sociétés savantes de médecine avaient interpellé les autorités sur l'absence de sanctions face à ce traitement de 30 000 patients Covid par l'IHU, le qualifiant de « plus grand essai thérapeutique "sauvage" connu ».
Interpellé fin mai au Sénat sur « une inertie des pouvoirs publics » face aux dérives de l'IHU de Marseille sous l'ère Raoult, le ministre de la Santé, François Braun, avait brandi la menace de sanctions contre les auteurs de cette étude.
Une première enquête ouverte il y a un an
L'ANSM, qui a rappelé en avril que l'utilisation de l'hydroxychloroquine « expose les patients à de potentiels effets indésirables qui peuvent être graves », avait déjà saisi le parquet de Marseille au printemps 2022, après avoir rendu un rapport cinglant sur des faits antérieurs à la crise du Covid-19. Rapport dans lequel elle fustigeait de « graves manquements » au sein de l'IHU.
L'Agence évoquait ainsi des essais souvent engagés sans obtenir l'avis obligatoire d'un comité indépendant ni même, parfois, le consentement de tous les patients examinés. Ainsi, des prélèvements rectaux avaient été réalisés au début des années 2010 sur des enfants atteints de gastro-entérite sans le consentement de leurs parents.
Sur la base de ce signalement, ainsi que d'un signalement antérieur datant d'octobre 2021, une enquête judiciaire avait été ouverte par le parquet de Marseille en juillet 2022 sur des soupçons d'essais cliniques non autorisés, mais qui ne visaient pas à ce stade le traitement du Covid-19.
Cette enquête, qui concernait initialement trois « recherche(s) interventionnelle(s) impliquant une personne humaine (RIPH) non justifiée(s) par sa prise en charge habituelle sans obtention de l'avis du comité de protection des personnes et de l'autorisation de l'ANSM », a été étendue le 29 mai à quatre autres recherches du même type, selon le parquet de Marseille, menées notamment sur des mineurs ou des majeurs protégés.
(avec AFP)
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