La médecine générale est en deuil. L’un de ses grands défenseurs, le Dr Michel Combier, est décédé à l’âge de 69 ans le mardi 9 mai. Figure historique de la CSMF – il a été de 2002 à 2013 président de sa branche généraliste – il a notamment participé à la mise en place avec la convention de 2005 du dispositif médecin traitant et en 2011 la généralisation de la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp). Il formait avec son ami le Dr Michel Chassang, aujourd’hui vice-président du Conseil économique, social et environnemental (Cese), un tandem reconnu de la profession.
Ils ont, tous les deux, étudié la médecine ensemble à Toulouse dans les années 70. Le Dr Combier a obtenu sa thèse de doctorat de médecine générale en 1987 à la faculté toulonnaise de Purpan, avant de s’installer dans sa ville. Il s’engage dans le combat syndical une dizaine d’années plus tard au syndicat des médecins de la Haute-Garonne, puis à l’Union nationale des omnipraticiens français (Unof). Dans les années 90, il se positionne contre le plan Juppé, pour la hausse du C à 20 euros et la fin des gardes obligatoires au printemps 2002. Il est également, fin 2009, l’un des farouches opposants à la campagne de vaccination contre la grippe H1N1 dans les vaccinodromes.
Union nationale des professionnels de santé (UNPS), Centre national des professions de santé (CNPS), membre titulaire de la commission de la nomenclature des actes professionnels, bureau du Collège de la médecine générale (CMG)… Le Dr Combier naviguera entre les instances nationales comme locales avant de quitter la scène syndicale en octobre 2013 à 60 ans. Un an plus tard, Marisol Touraine le décorera de la légion d’honneur à Ségur.
Une fin de carrière dans une MSPU
Il a fini sa carrière au sein d’une maison de santé pluriprofessionnelle universitaire (MSPU), avec notamment le Pr Stéphane Oustric et le Pr Laetitia Gimenez, qui détaille au Généraliste sa relation avec le praticien. « Nous nous sommes rencontrés dans le cadre de son activité syndicale lorsque j’étais à l’Isnar-IMG. J’ai ensuite migré vers Toulouse avec comme projet de m’y installer. Je l’ai remplacé au sein de son cabinet à l’été 2016 avant ma soutenance de thèse. Je me suis installée en collaboration avec lui, puis nous avons ensuite créé la MSP en juillet 2017 composée de sept généralistes et dix infirmiers. »
Au quotidien, raconte-t-elle, « il était toujours très jovial, ce qui m’a permis un début d’activité dans de bonnes conditions, dont je garde de très beaux souvenirs. Il me taquinait sur mes retards en consultation, lui qui était très droit et toujours à l’heure, c’était très important pour lui. » Autre facette du praticien, se rappelle le Dr Gimenez : « il adorait la musique et possédait des tonnes et des tonnes de CD, notamment de country. Il est allé plusieurs fois aux États-Unis et écoutait notamment les Rolling Stones, qu’il mettait souvent au cabinet. »
L’hommage des syndicats
Le jour de sa disparation, le Dr Chassang, président d’honneur de la CSMF, a tweeté « Michel Combier était un homme droit, loyal, militant engagé, dévoué. Mon ami et complice depuis 1975. Tristesse infinie ». Un hommage rendu également par l’actuel président de la CSMF, Dr Franck Devulder, qui a lui salué la mémoire d’un omnipraticien qui « a consacré sa vie aux valeurs de la médecine libérale au service des patients. Son engagement et son dévouement resteront un exemple ». Pour le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF, à qui le Dr Combier avait passé le relais en 2013, « c’est quelqu’un qui a marqué tous ceux qui l’ont rencontré : par son accent toulousain, son amour du rugby et son engagement. »
De son côté, le Dr Jean-Paul Ortiz, président d’honneur de la CSMF, raconte au Généraliste son héritage. « Il est l’un des piliers du syndicalisme médical des années 1995-2015 et fait partie de ces personnages incontournables lorsqu’on aborde la médecine générale, qu’il a défendue avec abnégation, conviction et ouverture. Nous avions des points communs, notamment la passion du rugby, même s’il supportait le Stade Toulousain et moi l’Union sportive arlequins perpignanais ! Dans mon bureau confédéral de 2014 à 2018, j’aimais beaucoup ses interventions pleines d’expérience et le regard qu’il portait sur l’exercice de la médecine libérale et générale. »
Une vie d’engagement
Le Dr Jérôme Marty, président de l’UFML-S, l’a aussi bien connu, rapporte-t-il. « Il était engagé à la CSMF Haute-Garonne avec mon père, à l’époque président, et, comme un passage de relais, je suis devenu son secrétaire général. Nous nous sommes aussi battus pour les URPS ensemble. C’était un homme fidèle aux idées de son syndicat, qui a défendu une vision pragmatique de la profession. Un médecin généraliste proche de ses patients, passionné par son métier et humaniste. Il a marqué la CSMF au niveau local et national. »
Le Dr Jean-Paul Hamon, président d’honneur de la FMF, se souvient d’un compagnon de route, droit dans ses bottes. « Je l’ai vraiment rencontré en 2002. C’est un vrai médecin généraliste, qui connaissait le métier. Même si nous n’étions pas forcément d’accord, nous pouvions discuter. Un type loyal, qui défendait la profession et qui la pratiquait toujours. Je ne peux que saluer sa vie d’engagement. »
Attentif à l’installation des jeunes médecins
Journaliste, puis directeur de la rédaction du Généraliste à l'époque où le Dr Combier était engagé dans le combat syndical, Christophe Gattuso se souvient qu'il « a accompagné la modernisation de la profession et était attentif à l’installation de la jeune génération, notamment l’attractivité du métier. Il a également défendu la mise en place des maisons de santé et s’est d’ailleurs lui-même installé dans l’une d’entre elles à Toulouse. »
« Personne ne dira du mal de Michel Combier », appuie le Dr Christian Lehmann, chroniqueur à Libération.
Le Généraliste s'associe à la peine de sa famille et de ses proches à qui nous présentons nos condoléances. Ses obsèques seront célébrées mardi 16 mai, à 10 h 30, à la basilique Saint-Sernin de Toulouse.
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