Enfin… Le décret définissant l’organisation et le fonctionnement du service d’accès aux soins (SAS) – cette plateforme universelle de réponse rapide aux urgences et de demandes de soins non programmés – a été publié au Journal officiel, samedi 15 juin, avec beaucoup de retard mais aussi la volonté de prendre en compte les inquiétudes de la profession pour assurer une généralisation.
Ce décret vise ainsi à clarifier les missions et compétences des professionnels de santé de la régulation ambulatoire et l'articulation de leur action avec celle de l'aide médicale urgente. Il définit les modalités de gouvernance des SAS. Il précise enfin les catégories des professionnels de santé qui contribuent au fonctionnement de cette plateforme.
Maintien des numéros d’appel spécifiques
Le schéma général du SAS est connu. Concrètement, premier niveau de réponse, l’appel reçu sera « qualifié » par un assistant de régulation médicale. À la suite – et en fonction – de cette qualification (second niveau), la personne « sera prise en charge soit par le service d’aide médicale urgente [lorsque la demande relève de soins urgents], soit par la régulation de médecine ambulatoire », lorsque la requête relève simplement de soins non programmés (SNP). Les outils numériques doivent permettre le cas échéant une réorientation secondaire « instantanée » entre le Samu et la régulation ambulatoire.
Première souplesse actée, qui était réclamée par la profession : l’accès au SAS par plusieurs voies possibles (et non pas seulement le schéma unique du 15). Ainsi, par dérogation, le SAS pourra être aussi accessible dans certains territoires « par le numéro national de permanence des soins » (116 117) ou même un autre numéro local lorsque ce dernier est en fonctionnement et réceptionné au centre de réception et de régulation des appels, à la date de publication du décret. Plusieurs syndicats se sont réjouis de cette possibilité, permettant une accessibilité par le numéro national de PDS des médecins libéraux, le 116 117.
Deuxième dérogation bienvenue : l'orientation vers une consultation par la régulation de médecine ambulatoire du SAS pourra être assurée par un outil « autre » que la plateforme numérique officielle du SAS dès lors que cet outil satisfait aux conditions exigées « dans un délai maximal de 24 mois » et que les données d'orientation sont transmises à la plateforme numérique nationale.
Le ministère de la Santé insiste sur sa volonté d’apaisement. L’État, confirme-t-il, a développé une plateforme numérique qui permet d’intégrer les agendas des professionnels « quel que soit le logiciel qu’ils utilisent » pour faciliter l’adressage du patient vers un professionnel de santé disponible. « Ce décret incite à l’utilisation de cette plateforme sans poser d’obligation », souligne Ségur. Autrement dit, les outils locaux, dès lors qu’ils sont fiables et transmettent leurs données, restent utilisables.
Régulation à distance possible, recours aux remplaçants et retraités…
Une autre évolution, qui n’était pas acquise, concerne le lieu de régulation. De fait, le texte facilite l’engagement des médecins généralistes en leur permettant de participer à la régulation téléphonique à distance, donc sans venir physiquement sur le plateau du Centre 15. Cela doit doper les vocations en permettant aux généralistes de travailler depuis leur cabinet, leur domicile ou une plateforme d’appel dédiée.
Par ailleurs, le texte reconnaît les profils variés de médecins aptes à participer aux activités de régulation du SAS. En l’occurrence, les médecins libéraux et salariés des centres de santé, mais aussi les docteurs juniors et les internes, les médecins remplaçants et retraités. Sur ce volet des praticiens retraités, les syndicats de libéraux ont obtenu gain de cause puisque ceux-ci n’auront plus besoin d’avoir conservé une activité clinique. Une simple « attestation du conseil départemental de l’Ordre de leur capacité à participer à la régulation de médecine ambulatoire » suffit désormais. Dans l'exercice de leur mission de régulation, ces médecins sont assistés par des « opérateurs de soins non programmés » qui peuvent communiquer les informations requises au patient et procéder, le cas échéant, à la prise de rendez-vous.
Infirmiers, pharmaciens et hôpitaux dans la boucle
En pratique, la régulation de médecine ambulatoire doit permettre de donner des conseils médicaux, pouvant aboutir à une prescription adressée au patient ou à une pharmacie ; d’orienter vers une consultation, une prise en charge à domicile ou une téléconsultation ; mais aussi le cas échéant d’orienter vers un infirmier, un pharmacien ou même un établissement de santé en admission directe ou vers une structure des urgences.
« Le travail syndical collectif mené main dans la main avec l’Ordre a payé », se félicite le Dr Franck Devulder, patron de la CSMF. Il reconnaît que le gouvernement a su entendre la nécessité d’aller vers plus de souplesse afin que chaque département « puisse rapidement avoir son SAS au service d’un meilleur accès aux soins ».
22 départements en cours de déploiement
Au ministère, on est plutôt satisfait de l’opération, menée de surcroît en pleine période d’instabilité politique. « La généralisation des SAS est un enjeu fondamental du renforcement de l’accès à l’offre de soins non programmés », se félicite Frédéric Valletoux, ministre délégué en charge de la Santé et de la prévention.
Pour mémoire, 74 SAS sont aujourd’hui en fonctionnement et couvrent 87 % de la population. Quelque 22 départements sont en cours de déploiement pour un démarrage à l’été. Gabriel Attal souhaitait que 100 % du territoire soit couvert d’ici à l’été, faute de quoi, il se déclarait prêt à rétablir les obligations de garde. A priori, il y a désormais peu de risques qu’il passe à l’acte.
Pour encourager les médecins libéraux à participer davantage au SAS, la nouvelle convention médicale prévoit des rémunérations incitatives. À compter du 1er janvier 2025, pour les effecteurs, sur régulation du SAS ou du centre 15, l’acte de 30 euros est majoré de 15 euros (SNP), soit 45 euros. Si la consultation est effectuée entre 19 heures et 21 heures, 5 euros supplémentaires s’y ajoute, soit 50 euros. L’objectif est d’inciter les médecins à prendre en charge les patients avant d’entrer dans le dur de la permanence des soins. En cas de visite à domicile, effectuée dans un délai de 24 heures à la demande du SAS, l’acte bénéficiera d’une majoration de 10 euros, soit un total de 65 euros (30 euros + 10 euros de majoration de déplacement + 15 euros de SNP + 10 euros). Pas de coup de pouce conventionnel en revanche pour les régulateurs du SAS. Leur rémunération reste à 100 euros de l’heure, non défiscalisée. Mais ce montant pourra être revu à la hausse par les ARS. Enfin, à compter de 2026, les médecins participant au SAS toucheront un forfait de 1 000 euros par an, sous trois conditions : exercer dans un département où le SAS est opérationnel, s’inscrire sur la plateforme et interfacer son agenda.
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