Cette histoire-là, personne n’aurait pu vraiment la voir venir. Un médecin généraliste retraité qui accepte de venir exercer en milieu rural, dans un désert médical, sur deux sites séparés distants d’une vingtaine de kilomètres… et qui peine à trouver des patients.
C’est pourtant la mésaventure qu’expérimente, pour l’heure, le Dr Mamode Sondagur. À 73 ans, ce généraliste girondin a pris sa retraite à l’automne dernier. Après 43 ans d’exercice dans son cabinet en solo, « à l’ancienne », dans la ville de Lormont, située à moins de 10 kilomètres de Bordeaux, le médecin de famille décide de raccrocher les gants. Mais, chassez le naturel, le métier lui manque. Six mois après avoir choisi de se retirer des affaires, il décide de rempiler dans le village de Préchac.
« J’ai une amie qui a une maison secondaire dans cette commune de Gironde d’environ un millier d’habitants. C’est elle qui m’a dit que la municipalité était à la recherche d’un médecin généraliste depuis dix ans. Et reprendre une activité dans un petit village, ça me disait bien. C’est comme ça que j’ai atterri à Préchac », témoigne le Dr Sondagur.
Difficile de faire changer les habitudes
Concours de circonstances, le maire a pu mettre immédiatement un local à disposition de sa nouvelle recrue, dans un ensemble immobilier situé dans le bourg, à proximité de la mairie et accueille déjà un ostéopathe et une psychomotricienne. Le Dr Sondagur s’y installe le 18 février. Et commence assez rapidement à quelque peu déchanter.
« Pour l’instant, je n’y exerce que trois jours par semaine : lundi, mardi et mercredi parce que le carnet de rendez-vous n’est pas du tout rempli. Je dois recevoir quatre-cinq patients par jour, par plus », se désole le praticien septuagénaire, qui habite à Bordeaux, à près d’une heure quinze de voiture de Préchac. Comment explique-t-il ce peu d’afflux dans un territoire en déshérence médicale ?
« Ici, c’est surtout une population âgée, et en dix ans sans généraliste dans le village, les gens se sont débrouillés pour trouver leur médecin traitant ailleurs », analyse le Dr Sondagur. Qui constate, en pratique, combien il est difficile de faire changer les habitudes. « Je reçois des patients mais ils me disent : “Nous, on a notre médecin, on est venu pour une urgence”, poursuit le médecin de famille qui veut croire à une embellie prochaine. « Quand ce sont des jeunes qui viennent consulter, la plupart me demandent d’être leur médecin traitant. »
Moi, je voulais mettre mon expertise au service des patients d’une petite commune qui n’avait pas de médecin
Dr Mamode Sondagur
De fait, la nouvelle de l’arrivée d’un généraliste n’est pas passée inaperçue aux alentours. C’est ainsi que le maire voisin de Saint-Symphorien, distant d’une quinzaine de kilomètres a contacté le Dr Sondagur pour lui proposer d’y exercer aussi quelques jours par semaine. Ses nouvelles consultations ont commencé ce mois de mai… Pour un premier résultat similaire à celles de Préchac. « Là-bas, c’est pareil, la mairie m’offre un local dans cette bourgade de presque 2 000 habitants mais je n’ai pas de patients », constate le généraliste. Et pourtant, le maire avait fait la publicité de sa venue trois semaines avant le jour de son arrivée. « Du coup, je ne m’y suis pas rendu un lundi, mais j’ai laissé mon numéro de téléphone en cas d’urgence ou pour caler un rendez-vous », confie désemparé, le Dr Sondagur au Quotidien.
Le monde à l’envers
À ce jour, pour s’éviter deux heures et demie de trajet quotidien, le généraliste, au statut « de médecin retraité actif », dort donc sur place, au cabinet de Préchac, les trois jours où il intervient. « Moi, je voulais relever de nouveaux défis et mettre à profit mon expertise au service des patients d’une petite commune qui n’avait pas de médecin », lâche-t-il, songeur.
Malgré tout, ces derniers temps, le Dr Sondagur observe un léger regain d’activité surprise dans son exercice rural, en la personne d’anciens patients citadins bordelais prêts à avaler 120 kilomètres pour avoir accès à un médecin généraliste. Le monde à l’envers !
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