Alors que les médecins du Nord sont appelés à renouveler la moitié des conseillers ordinaux de l’Ordre départemental des médecins le 9 mars, la tension monte d’un cran entre son président, le Dr Jean-Philippe Platel, et la CSMF Hauts-de-France. En plein contexte électoral, le Dr Platel est sorti soudainement de sa réserve pour défendre son conseil et ses conseillers « qui font l’objet d’une attaque injuste et sans précédent ». Joint par Le Quotidien le 25 février, l’élu ordinal se dit « fâché » et réitère ses propos. « Je veux juste défendre l’action de mon conseil dont le travail a été fait de façon bienveillante, respectueuse à la fois des médecins et des patients. Il n’y a pas d’interprétation discutable du Code de la santé publique sur la gestion des plaintes », martèle le président ordinal.
Certains patients sortent du bureau et envoient un mail pour dire qu’ils ont été mal reçus. Et c’est considéré comme une plainte.
Dr Bertrand Legrand, secrétaire général de la CSMF Hauts-de-France
Dans sa ligne de mire, un tract électoral de la CSMF Hauts-de-France envoyé à tous les médecins votants le 12 février. Dans ce document consulté par Le Quotidien, le syndicat régional se dit « en désaccord » avec l’équipe ordinale en place dans la façon d’instruire des plaintes à l’encontre des médecins. La CSMF cite un article de La Voix du Nord où le secrétaire général de l’Ordre des médecins avait expliqué la hausse de 24 % en un an du nombre de plaintes (174 dossiers) enregistrées en indiquant que son équipe serait obligée de les traiter en raison du Code de santé publique qui imposerait aux conseils départementaux d’instruire toute sollicitation écrite d’un patient contenant les mots « plainte » ou « sanction ».
C’est cette « interprétation » qui est critiquée par la CSMF Hauts de France, qui juge que les médecins ne sont pas assez protégés par leur Ordre face aux plaintes trop légères ou farfelues. « Certains patients sortent du bureau et envoient un mail pour dire qu’ils ont été mal reçus. Et là, c’est considéré comme une plainte et le médecin est convoqué pour une conciliation », illustre le Dr Bertrand Legrand, secrétaire général de la CSMF Hauts-de-France. « Avant, il y avait des signalements et l’Ordre appelait les médecins et c’était réglé. Maintenant, toutes les plaintes sont systématiquement traitées même si elles ne sont pas recevables. Nous estimons au contraire qu’une étude préalable de leur recevabilité est nécessaire ainsi qu’une trace écrite pour que le médecin puisse engager la responsabilité du plaignant en cas de dénonciation calomnieuse », martèle le généraliste.
Main basse syndicale sur l’Ordre ?
Alors pour « réformer la gestion des plaintes », la CSMF Hauts-de-France affiche son soutien direct aux candidats qui partagent son analyse. Un soutien syndical qui irrite donc au plus haut point le président de l’Ordre sortant qui se représente à cette élection. Le Dr Platel se défend en indiquant que sous sa présidence, un dispositif a été mis en place pour régler des « petits signalements ». « Deux secrétaires généraux adjoints sont là pour appeler le médecin et le plaignant. C’est réglé en général dans les quinze jours », dit-il. En 2024, l’institution a enregistré « une centaine de signalements », un chiffre « stable », selon le président de l’Ordre départemental.
Je ne supporte pas qu’un syndicat, qu’un parti politique veuille faire main basse sur l’Ordre !
Dr Jean-Philippe Platel, président de l’Ordre départemental du Nord
« Si on reçoit un courrier ou un mail de patient qui dit qu’il dépose plainte, le conseil n’a pas d’autre choix que de procéder à la conciliation », reconnaît le Dr Platel. « On appelle le médecin pour lui expliquer la conciliation et on ne le fait pas se déplacer si la plainte est manifestement abusive », ajoute l’élu ordinal, qui précise que 84 % des plaintes sont conciliées, n’aboutissant pas à une transmission en chambre disciplinaire. Cette procédure est en effet prévue par l’article L4123-2 du Code de la santé publique.
Face à cette offensive syndicale, le Dr Platel rappelle « qu’il n’y a pas de place pour les syndicats à l’Ordre ». « Je ne supporte pas qu’un syndicat, qu’un parti politique veuille faire main basse sur l’Ordre ! » Une agression que réfute la CSMF, qui préfère évoquer un « un débat instructif » sur cette question.
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