Ça y est ! Elle a pris du retard, mais la lettre de cadrage des négociations de la future Convention médicale est enfin parvenue entre les mains du directeur général de l’Assurance maladie Thomas Fatôme.
Ce 27 octobre, François Braun et Agnès Firmin Le Bodo ont donc listé leurs priorités afin d'orienter les discussions entre les syndicats de médecins et l’Assurance maladie lors des négociations qui s’ouvriront finalement le 9 novembre.
Si elles débuteront plus tard que prévu, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et l’ouverture des travaux du Conseil national de la refondation en santé ont déjà donné le ton et un aperçu des grands axes de travail.
D’ailleurs la lettre des ministres est claire sur ce point : « cette négociation s'ouvre alors que les travaux du Conseil national de la refondation en santé ont été lancés le 3 octobre et devra dès lors tenir compte des sujets identifiés comme prioritaires dans ce cadre », écrivent-ils, et de citer notamment l’objectif des 10 000 assistants médicaux d’ici 2025 et l’accès à un médecin traitant ou une équipe soignante de référence pour tous.
Sans donner de chiffres de l’enveloppe financière pour cette Convention, là encore le message est limpide : « dans le contexte financier actuel, seront privilégiées les mesures apportant un réel bénéfice aux Françaises et aux Français en matière d'accès à la santé ».
Exercice solidaire des médecins hors déserts
Dans le détail, les ministres fixent à l’Assurance maladie quatre grands axes pour cette Convention. « Le premier objectif est d'agir de manière déterminée contre toutes les inégalités d'accès à la santé, qu'elles soient territoriales, sociales ou financières. »
Avec l’ambition de permettre un meilleur accès des Français aux médecins, le ministère de la Santé évoque notamment des adaptations pour les soins non programmés sur : les modalités de participation à la permanence des soins ambulatoires, les conditions de mobilisation des remplaçants et les modalités de rémunération de l'effection dans le cadre du service d'accès aux soins (SAS). Les décisions dans ce domaine devront notamment s’appuyer sur le bilan des mesures prises cet été. Les rapports de l'Igas ont été rendus au ministre fin septembre mais sont restés confidentiels pour le moment.
Concernant la démographie médicale, le ministère demande à l’Assurance maladie d’identifier des nouveaux leviers notamment pour « la participation à un exercice solidaire en réponse aux besoins de santé par les médecins n'exerçant pas en zone sous-dense ».
Et pour les médecins exerçant dans des territoires en difficulté, « il est nécessaire de refonder le pacte entre les médecins libéraux et l'Assurance maladie pour une plus grande efficacité et plus de lisibilité. Les efforts consentis par l'État, les collectivités locales et l'Assurance maladie pour aider et valoriser la pratique médicale dans ces territoires devront être mieux coordonnés et renforcés, et faire l'objet d'engagements forts des professionnels en contrepartie », avancent les ministres.
Ces derniers rappellent aussi qu’ils veulent que les solutions viennent des acteurs du système de santé eux-mêmes.
Les ministres évoquent également la rationalisation et l’optimisation des aides démographiques, des vacations de spécialistes notamment dans les territoires en manque de médecins via les hôpitaux de proximité, la structuration d’équipes de soins spécialisés ou encore « de nouveaux outils, incitatifs ou de régulation » en fonction des besoins des territoires en premier comme en second recours.
L’objectif est également de maintenir en activité les médecins en exercice avec « un cadre incitatif et adapté aux besoins des médecins ». La lettre parle aussi d’une valorisation de la pratique. « Les différents modes de rémunération peuvent être utilisés à cette fin, en privilégiant les rémunérations valorisant un changement de pratiques », précise les ministres. La facilitation du cumul emploi retraite est aussi évoquée.
Le sujet des inégalités financières d’accès aux soins devra aussi être discuté, notamment à travers les outils de régulation des dépassements d’honoraires Optam et Optam Co.
Revoir la Rosp
Le deuxième grand axe de cette convention sera le virage préventif.
Dans ce domaine les partenaires conventionnels devront notamment se pencher sur les futures consultations de prévention annoncées dans le PLFSS.
Le ministère souhaite aussi revoir la Rosp qui « devra évoluer pour être principalement centrée sur ces enjeux de prévention avec un nombre plus limité d’indicateurs », écrit-il.
Une meilleure prise en compte des questions de santé mentale fait aussi partie des priorités avec le renforcement de la coordination entre généralistes et professionnels spécialisés en psychiatrie et en santé mentale. « Les troubles du sommeil, l'équilibre alimentaire et la promotion de l'activité physique seront également à inclure dans les priorités de santé publique », précise la lettre de cadrage.
Les enjeux écologiques et de développement durable doivent aussi trouver leur place dans la future Convention. Le ministère cite notamment « les enjeux de sobriété médicamenteuse et la sensibilisation des patients sur l’observance des traitements ».
La maîtrise du volume des prescriptions ou la lutte contre la fraude sont également citées comme axes à renforcer. Et le ministère s’appuie notamment là-dessus pour pouvoir dégager l’enveloppe financière de cette Convention.
« Ces actions sur la qualité, la pertinence et la lutte contre la fraude permettront de dégager les marges de manœuvre nécessaires à la signature d'une convention ambitieuse s'inscrivant dans la trajectoire des finances publiques fixée par la loi. »
Développer les coopérations et la rémunération mixte
Le troisième axe est de libérer du temps médical aux médecins afin qu’ils puissent augmenter leur patientèle.
Les ministres appellent à « consolider le rôle des médecins traitants dans le parcours de soins ». Un objectif qui passera notamment par « une revalorisation de leurs conditions d’exercice ».
« Dans la poursuite du mouvement déjà, engagé, nous souhaitons que vous simplifiez et allégiez les contraintes administratives qui pèsent sur les médecins », demandent également les ministres.
En priorité, ils ciblent le développement des assistants médicaux avec l’objectif de 10 000 assistants en 2025.
La collaboration avec les autres professionnels de santé est aussi mise en avant, à travers « de nouvelles répartitions des compétences, un renforcement des protocoles de coopération formalisé » ou « de nouveaux modèles de coopération ».
Dans ce volet, le ministère réclame aussi une accentuation de la diversification des modes de rémunération. « Il apparaît en effet nécessaire de développer un modèle de rémunération mixte pour les médecins volontaires, via le développement d'une rémunération forfaitaire partiellement substitutive à l’acte. »
Les modes de rémunération devront aussi continuer à accompagner le mouvement en faveur de l’exercice coordonné.
Objectif signature avant la fin du premier trimestre 2023
Enfin le dernier axe concerne le déploiement de la feuille de route du numérique en santé.
Pour mener à bien les engagements qu’elle porte, l’Assurance maladie devra notamment mobiliser comme levier et comme cela est déjà prévu : « la modulation du forfait structure ». Sur la télémédecine, François Braun et Agnès Firmin Le Bodo souhaitent que le développement de la téléconsultation et la téléexpertise se poursuive « tout en préservant un service de proximité et en garantissant la qualité et la pertinence des prises en charge ».
Tout un programme donc pour les partenaires conventionnels qui vont avoir de quoi discuter dans les mois à venir. Mais dans un communiqué, les ministres affirment avoir toute confiance « dans la capacité des partenaires conventionnels, représentants des médecins libéraux et de l’Union des Caisses d’Assurance maladie, à relever les défis importants de cette négociation qui doit s’achever avant la fin du premier trimestre 2023 ».
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